— Bolcheviks pas loin, ajouta un autre Ukrainien en se tournant vers nous. Nous partir avec
— Où sont nos blessés ? grogna mon compagnon, gêné de s’être fait surprendre en pleine ronflette.
— Même place que soir avoir, répondit en souriant le popov qui nous accompagnait. Deux
Nous le regardâmes, perplexes.
— Venez nous aider, lança le fantassin.
Effectivement, deux encore des malheureux blessés avaient succombé. Il n’en restait que quatre, bien mal en point. L’un d’eux secouait, en geignant, son bras droit où la main manquait. Son pansement purulent suintait et trahissait la gangrène qui déjà envahissait la plaie.
— Creusez deux fosses là-dedans, commanda le grand Allemand. Il nous faut ensevelir ces pauvres camarades.
— Nous pas militaires, répliqua toujours en souriant le popov qui était à nos côtés.
— Vous, creusez tombe… Creusez deux fosses, insista l’Allemand en braquant brusquement sa mitraillette sur le popov. Creusez deux fosses et en vitesse !
Le regard du Russe brilla farouchement en fixant l’œil noir du canon de l’arme. Il lança quelques paroles en russe et tous s’activèrent à cette besogne.
Nous avions commencé à défaire les pansements de nos camarades, lorsqu’un grondement de moteur emplit la cour. Sans arrière-pensée, nous nous précipitâmes pour voir. Plusieurs véhicules blindés venaient de surgir, d’où sautèrent des groupes de soldats allemands qui se ruèrent sur un grand abreuvoir. Quatre ou cinq Mark-4 arrivèrent à leur suite. Un officier descendit d’un steiner et se dirigea vers l’endroit où nous étions en train de soigner nos blessés. Nous nous précipitâmes au-devant de lui à l’extérieur. Nous nous nommâmes.
—
On essaya de foutre la V.W. amphibie en ordre de marche. Mien à faire : l’embrayage était, sans doute, bousillé. Nous la sortîmes du hangar. Un de nos landser cala une grenade dans le moteur. Un instant après celui-ci volait en éclats. D’autres véhicules arrivèrent. D’autres repartirent dans la direction d’où ils venaient. C’était à n’y rien comprendre. Pas très loin, au sud-est, ça pétaradait sans discontinuer. Puis, un flot de camions et de véhicules de toutes sortes passa sur la route, près du kolkhoze. Quelques-uns s’y arrêtèrent. Je posai des questions sur mon unité. Personne n’en avait entendu parler. De toute évidence, mes copains de la 9e Rollbahn devaient se trouver loin à l’ouest. Loin du front où j’allais être dirigé.
Peu de temps après, je pris la direction de l’ouest en compagnie de soldats venus de différentes unités d’infanterie. Le fait d’être mêlé à ce groupe de combattants me causa, une trentaine d’heures plus tard, pas mal de désagréments. De toute évidence, nous suivions une ligne parallèle au front. C’est-à-dire que la poussée russe s’exerçait perpendiculairement à notre trajet. Au nord, très loin encore, une autre poussée s’exerçait vers le sud, tendant à encercler les forces allemandes résidant encore dans le triangle Voronej-Koursk-Kharkov.
Notre route se poursuivit donc pendant une journée et demie sur un chemin de mélasse où nous ne connûmes d’autres ennuis que mécaniques. Le matériel que nous employions était en Russie depuis l’avance allemande de 41 et avait cruellement souffert et le nombre de camions, tracteurs, chars, que nous dûmes abandonner dans cette région fut considérable.
Les chars, en particulier, subirent une usure excessive en raison des services que nous leur demandions et pour lesquels ils n’avaient pas été conçus. Pendant toute la période hivernale, ce furent à peu près les seuls véhicules à pouvoir se déplacer normalement. Il ne fut pas rare de voir ces tanks traîner jusqu’à cinq camions à travers des chemins tout juste praticables pour des mulets. Aussi, lorsqu’ils durent faire face à la contre-offensive russe, leur usure et leur légèreté, qui nous avaient tant servi jusqu’à présent, ne purent rien contre les fameux T‑34, incontestablement supérieurs aux Mark‑2 et 3. Plus tard, les chars Tigre et Panthère firent front aux blindés soviétiques et se jouèrent des T‑34 et des K.W.‑85.
Malheureusement, leur petit nombre, tout comme pour l’aviation, plia irrémédiablement sous une multitude ennemie déployée sur deux fronts, représentant une forteresse à maintenir de 3 500 km de façade. Pour ne citer qu’un exemple, les combats qui eurent lieu sur la Vistule, au nord de Krakov, exposèrent vingt-huit mille combattants allemands appuyés par trente-six chars Tigre et une vingtaine de Panthère à deux armées soviétiques fortes de six cent mille hommes et de sept régiments blindés pourvus de onze cents tanks de différentes marques.