– Voilà… Il semble que vous entreteniez l’illusion selon laquelle je serais disposé à obéir… Quelle est la formule, déjà ? Ah, oui…
Le teint d’Ombrage devenait de plus en plus rouge. On aurait dit que quelqu’un la remplissait peu à peu d’eau bouillante. Fudge fixa Dumbledore d’un air particulièrement stupide comme s’il venait de recevoir un coup qui l’aurait à moitié assommé. Il ne parvenait pas à croire ce qui se passait sous ses yeux. Il émit une sorte d’éructation puis se tourna vers Kingsley et le sorcier aux cheveux courts, qui était le seul à n’avoir pas dit un mot jusqu’à maintenant. Celui-ci adressa à Fudge un signe de tête rassurant et s’écarta légèrement du mur. Harry vit sa main glisser d’un geste presque naturel en direction de sa poche.
– Ne soyez pas idiot, Dawlish, dit Dumbledore avec gentillesse. Je suis certain que vous êtes un excellent Auror – je crois me souvenir que vous avez obtenu la mention « Optimal » dans toutes vos épreuves d’A.S.P.I.C. – mais si vous essayez de… heu… m’emmener
Le dénommé Dawlish cligna les yeux d’un air assez bête. Il regarda à nouveau Fudge mais, cette fois, il semblait attendre un signe lui indiquant ce qu’il convenait de faire.
– Ainsi donc, ricana Fudge qui s’était ressaisi, vous avez l’intention d’affronter Dawlish, Shacklebolt, Dolores et moi-même à vous tout seul, c’est bien cela, Dumbledore ?
– Par la barbe de Merlin, non, répondit Dumbledore avec un sourire. Tant que vous ne serez pas assez sot pour m’y obliger.
– Il ne sera pas tout seul ! assura d’une voix forte le professeur McGonagall en plongeant la main dans sa robe.
– Oh, si, il le sera, Minerva ! répliqua sèchement Dumbledore. Poudlard a besoin de vous !
– Ça suffit, ces sottises ! s’exclama Fudge qui sortit sa propre baguette magique. Dawlish ! Shacklebolt !
Un éclair de lumière argentée illumina la pièce. Il y eut une détonation, comme un coup de feu, et le sol trembla. Une main attrapa Harry par la peau du cou et le força à se coucher au moment où jaillissait un deuxième éclair d’argent. Plusieurs portraits se mirent à hurler, Fumseck lança un cri aigu et la pièce se remplit d’un nuage de poussière qui fit tousser Harry. Il vit alors une silhouette sombre s’effondrer avec fracas devant lui. Puis un hurlement aigu retentit, suivi d’un bruit sourd, et quelqu’un s’écria : « Non ! » Il entendit ensuite un bris de verre, des pas précipités, un grognement… et le silence revint.
Harry se débattit pour voir qui l’étranglait à moitié et aperçut le professeur McGonagall accroupie à côté de lui. Elle les avait écartés de force, Marietta et lui, de la trajectoire des éclairs. De la poussière flottait toujours dans la pièce et retombait lentement sur eux. Un peu essoufflé, Harry vit une haute silhouette s’approcher.
– Ça va ? demanda Dumbledore.
– Oui ! répondit le professeur McGonagall.
Elle se releva en hissant Harry et Marietta pour les aider à se remettre debout.
La poussière qui se dissipait laissait voir peu à peu l’étendue des dégâts. Le bureau de Dumbledore était retourné, toutes ses tables de bois fin renversées et les instruments d’argent en morceaux. Fudge, Ombrage, Kingsley et Dawlish, allongés par terre, demeuraient immobiles. Fumseck, le phénix, volait en larges cercles au-dessus d’eux en chantant doucement.
– Malheureusement, j’ai dû infliger aussi le maléfice à Kingsley, sinon, ils auraient eu des soupçons, dit Dumbledore à voix basse. Ses réflexes ont été remarquables, il a réussi à modifier la mémoire de Miss Edgecombe pendant que tout le monde regardait ailleurs – vous le remercierez pour moi, voulez-vous, Minerva ? Ils ne vont pas tarder à se réveiller, maintenant, et il vaudrait mieux qu’ils ne sachent pas que nous avons pu communiquer ; vous devrez agir comme si aucun laps de temps ne s’était écoulé entre leur évanouissement et leur réveil. Faites-leur croire qu’ils ont simplement été jetés à terre, ils ne se souviendront de rien.
– Où irez-vous, Dumbledore ? murmura le professeur McGonagall. Square Grimmaurd ?
– Oh non, répondit-il avec un sourire sinistre. Je n’ai pas l’intention d’aller me cacher. Fudge regrettera bientôt de m’avoir délogé de Poudlard, je vous le promets.
– Professeur Dumbledore…, commença Harry.
Il ne savait pas quoi dire d’abord : qu’il était désolé d’avoir constitué l’A.D. et provoqué ainsi tout ce bouleversement ou qu’il se sentait terriblement coupable à l’idée que Dumbledore quitte Poudlard pour lui épargner le renvoi ? Mais Dumbledore l’interrompit avant qu’il ait pu prononcer un mot de plus.