Читаем Cinquante ans plus tard полностью

Comparant sa fille à une fleur fanée et triste, la haine du tribun à l'encontre des idées chrétiennes ne faisait qu'augmenter, il se souvenait de Cirus avec d'autant plus d'aversion et de rancœur. Le pénible contraste dans la destinée de ses filles était pour lui un sujet de profondes méditations. Il s'intéressait à elles deux avec la même affection ; néanmoins, malgré ses bonnes intentions, la plus jeune semblait lointaine à sa dévotion paternelle. Elle n'appréciait pas la fréquentation des milieux en société, ni ne s'intégrait aisément au rythme domestique comme il l'aurait souhaité. Ses yeux n'avaient jamais manifesté d'intérêt pour les fantaisies de la jeunesse et, plongés dans des schismes constants, ils semblaient se fixer dans un ailleurs que son esprit paternel n'avait jamais pu définir exactement. À son avis, elle était victime d'une si grande fragilité, que son zèle de père attribuait à l'influence des principes chrétiens dont elle s'était imprégnée en contact avec les esclaves, là-bas en Palestine... Par bonheur Helvidia serait heureuse et cela, en quelque sorte, le consolait !... Quant à Célia, lui et sa femme plus tard l'emmèneraient en des terres étrangères où sa sensibilité maladive pourrait changer de manière salutaire.

Tandis que le tribun faisait tant d'efforts pour dissimuler de telles conjectures, les joies festives se multipliaient au sein du foyer.

Mais au fur et à mesure qu'augmentaient les espoirs et les joies familiales, Célia remarquait que ses souffrances morales dépassaient ses propres forces.

La nouvelle de la condamnation de Cirus comme conspirateur déchirait son cœur. D'ailleurs, il suffirait d'un seul mot venant de l'Empereur pour que son terrible supplice cesse. Ces perspectives angoissantes annihilaient tous ses espoirs. À ses côtés, le trousseau de sa chère sœur se couvrait de perles et de fleurs ! Elle ne lui enviait pas son bonheur, elle ne désirait que sauver la vie de l'élu de son cœur. Elle priait toujours, mais ses prières étaient contaminées par une détresse bien réelle sans la douce légèreté d'antan qui les faisait monter au ciel.

Maintenant, les vibrations spirituelles étaient mêlées d'anxiétés amères et pénibles !... Elle désirait voir Cirus, entendre sa voix, savoir de sa bouche que son cœur continuait ferme et résigné face à la mort pour que son âme puise dans son courage, mais ne pouvait y penser. Ses parents ne l'approuveraient jamais. Aussi des réflexions éprouvantes envahissaient son esprit, l'affaiblissant.

En quelques jours, son organisme ne se tenait plus debout. C'est ainsi qu'avec tout le bon sens qui caractérisait ses initiatives, Alba Lucinie s'est dit qu'il pourrait lui être bénéfique de la faire transporter à l'Aventin où elle serait bien entourée auprès de son vieux grand-père et de Marcia qui l'adoraient.

Une fois l'idée acceptée, Cneius Lucius vint la chercher personnellement avec toute sa sollicitude paternelle.

Chez lui la jeune fille sortit de cet état fébrile qui la débilitait tant, mais son singulier abattement moral se jouait de tous les soins du vénérable ancien qui inventait mille manières de ramener la joie sur le visage de son adorable petite fille.

Un beau jour, mettant en jeu ses capacités psychologiques pleines de tendresse, il s'est approché de sa petite-fille, s'exclamant avec une profonde bonté :

Célia, ma chérie, il me peine de te voir ainsi abattue et malade, malgré tous les efforts prodigués par notre amour empressé.

Et comme il voyait des larmes briller au bord de ses yeux, il a poursuivi affectueux :

Moi aussi, ma fille, au fond de ma conscience, je suis aujourd'hui un adepte du christianisme avec toute la ferveur de mon esprit ! Je connais l'essence des Évangiles évoqués par les affectueuses suggestions de ton âme candide et généreuse !... Pour moi maintenant, les sacrifices faits à nos vieux dieux silencieux et froids ne servent plus à rien, car seules servent les offrandes de notre propre cœur à celui qui veille sur notre destinée du Haut de son trône ! Mais écoute mon enfant : ne sais-tu pas que Jésus ne veut pas la mort du pécheur ? Ne connais-tu pas cet enseignement plein de vie et de joie ?

Et comme s'il devinait les peines qui lacéraient ce cœur affectueux et croyant, il avait aussi les yeux larmoyants.

Sa petite-fille reçut ses paroles comme s'il s'agissait d'un doux élixir et répondit :

Oui, je comprends tout cela et je prie Jésus de m'accorder des forces pour trouver à travers votre exemple une raison à ma vie...

Cette réponse cependant fut à demi prononcée, une vague de larmes envahit ses grands yeux calmes comme si elle hésitait à confesser au vénérable vieil homme sa pénible et incessante préoccupation.

Tendrement, Cneius Lucius l'a étreinte alors qu'elle murmurait d'une voix suppliante :

Grand-père, je promets d'avoir la foi et de surmonter toutes mes souffrances, mais je désirerais voir Cirus avant sa mort.

Le respectable ancien comprit combien il lui serait difficile de satisfaire un tel désir mais il a répondu sans hésiter :

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