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Je suis sortie de ma couchette pour aller à l’avant. Turk ne dormait toujours pas, il veillait pour rien. Le vent se déchaînait toujours, mais avec un peu moins de force. D’après nos capteurs, la pluie qui cinglait la coque était chaude comme de la vapeur.

J’ai parlé à Turk de mon rêve et de sa signification. Je lui ai dit que j’en avais assez de jouer à être Allison. Que je n’avais pas un nom valant la peine d’être porté. J’allais mourir sur une planète vide et personne ne saurait qui j’étais ou avais été.

« Je sais qui tu es », a-t-il répondu.

Nous nous sommes assis l’un près de l’autre sur une banquette en face de la paroi-fenêtre. Il m’a prise dans ses bras et m’a serrée contre lui jusqu’à ce que je me calme.

C’est à ce moment-là qu’il m’a raconté ce qui s’était passé à Centre-Vox avant notre fuite. Il m’a dit qu’il avait parlé à Oscar et, par l’intermédiaire d’Oscar, au Coryphée. Il avait avoué une vérité sur lui-même.

« Laquelle ? »

Je croyais connaître la réponse. Je croyais qu’il parlait de la vérité qu’il esquivait depuis que nous l’avions recueilli dans le désert d’Équatoria, la terrible et évidente vérité sur lui.

Mais il m’a raconté une histoire différente. Il m’a raconté avoir tué quelqu’un, quand il était jeune homme sur la Terre en vie. Il parlait avec une retenue sinistre, le corps raide, le visage détourné et les poings serrés. Je l’ai écouté attentivement jusqu’au bout.

Peut-être ne voulait-il pas que je réponde. Peut-être le silence aurait-il mieux valu pour lui. Mais nous n’avions plus vraiment d’avenir et je ne voulais pas mourir sans que cette importante vérité n’ait été dite.

Une fois qu’il a repris contenance, j’ai demandé : « Je peux te raconter une histoire, moi aussi ?

— Je ne vois pas ce qui t’en empêche.

— C’est une histoire d’Allison. Elle s’est passée sur la Terre d’avant. À part ça, elle ne ressemble pas du tout à la tienne. Mais elle a longtemps pesé sur la conscience d’Allison. »

Il a hoché la tête, en attente.

« Son père avait été soldat, dans sa jeunesse. Soldat affecté à l’étranger dans les années avant le Spin. Il avait quarante ans à la naissance d’Allison, donc cinquante le jour de son dixième anniversaire. Ce jour-là, il lui a offert un cadeau, une peinture à l’huile dans un vilain cadre en bois. Elle a été déçue en le déballant – comment avait-il pu penser lui faire plaisir avec un portrait amateur d’une femme tenant un bébé dans ses bras ? Il lui a alors raconté, presque gêné, qu’il l’avait peint lui-même. Quelques années plus tôt, le soir, dans son bureau. Il lui a dit que la femme représentée était la mère d’Allison et le bébé Allison elle-même. Ça l’a surprise, parce que son père n’avait jamais semblé artiste, il gérait un magasin de chaussures dans un centre commercial et elle ne l’avait jamais entendu parler littérature ou peinture. Mais avoir une petite fille, il lui a expliqué, était ce qui lui était arrivé de mieux dans la vie, et histoire de se souvenir de ce sentiment, il avait peint ce portrait. Qu’il voulait maintenant donner à Allison. Elle a donc conclu que c’était plutôt un beau cadeau, après tout, peut-être le meilleur qu’on lui avait jamais fait.

« Huit ans plus tard, on a diagnostiqué à son père un cancer du poumon. Ça n’a pas été une grande surprise : il fumait un paquet par jour depuis qu’il avait douze ans. Et pendant quelques mois, il a essayé de se comporter comme si tout allait bien. Sauf qu’il s’est affaibli peu à peu et qu’il a fini par passer la plus grande partie de la journée au lit. Quand il est devenu trop difficile pour la mère d’Allison de s’occuper de lui, quand il n’est plus arrivé à manger ni à se lever, même pour aller aux toilettes, il a dû partir à l’hôpital, et Allison a compris qu’il ne reviendrait pas. Il a été admis dans ce qu’on appelait une unité de soins palliatifs. En gros, les médecins l’aidaient à mourir. Ils lui donnaient des médicaments contre la douleur, un peu plus chaque jour, mais il est resté à peu près lucide jusqu’à la dernière semaine, même s’il pleurait beaucoup – les docteurs parlaient de “labilité émotionnelle”. Et un jour qu’Allison lui rendait visite, il lui a demandé d’apporter la peinture, pour qu’elle lui rappelle de vieux souvenirs quand il la regarderait.

« Mais elle n’a pas pu le faire. Elle ne l’avait plus. Elle avait d’abord accroché le portrait sur le mur au-dessus de sa tête de lit, mais à un moment, il avait commencé à la gêner, il lui semblait rudimentaire et sentimental et elle ne voulait pas que ses amis le voient, alors elle l’avait mis dans un placard, hors de vue. Son père s’en était peut-être aperçu, mais il n’avait jamais rien dit. Puis un jour qu’elle faisait le tri dans ses vieilles affaires, ses trucs de bébé, ses poupées et ses jouets auxquels elle ne toucherait plus jamais, elle l’avait mis avec tout le reste dans un carton qu’elle avait apporté à une œuvre de bienfaisance.

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