Elle a les ramasse-miettes qui font du morse. Oui, toute seulâbre ; petit ange, va ! La main-d'œuvre étrangère elle se la recrute sur place, miss Valérie. Elle déguste les produits du terroir. Pas la peine d'emporter son manger, elle fait son marché sur place. Les denrées fraîches, y a que ça de vrai. On ne peut qu'applaudir à cet esprit d'organisation et à ce goût de la liberté, vous ne pensez pas? Au lieu de se trimbaler un gnard qui la ferait tartir et lui imposerait ses quatre volontés, elle suit seule sa petite bonne-femme de chemin. Elle coupe aux corvées, à la vision d'un gars qui se rase ou qui lit pendant deux plombes avant de roupiller.
On se téléphone une boutanche de rouille, après quoi, comme je lui demande de me décrire sa voiture-salon, elle me propose de la visiter. C'est gentil, non? Voilà qui part d'un sacré naturel ! Moi, vous me connaissez? Je ne sais pas dire non dans ces cas-là. D'autant plus que j'adore les petites Suissesses (et même les grandes). On nous bat les pendeloques avec les prouesses plumardières de la Française, bon, d'accord, elle a le coup de reins impeccable, l'esprit inventif (ça oui, surtout) et beaucoup de conscience postérienne. Mais il ne faudrait pas pour autant diminuer le mérite des étrangères. Tenez, la Suissesse, justement, c'est pas un lot à réclamer, loin de là ! Elle tient sa place au dodo, croyez-moi. Le cœur à l'ouvrage elle l'a. Et l'ardeur idem. La seule réserve que je ferais peut-être, en étant chipoteur, ce serait son manque de nuances. Ça pèche dans le fignolage, trop de fougue comprenez-vous? Trop d'élan spontané ! Trop d'ardeur, quoi ! Victime de sa qualité dominante. Mais ça reste une des reines, j'affirme ! Un jour que j'aurai le temps, je vous écrirai un gros bouquin sur les gerces et l'amour international. Quand on a de l'expérience, c'est un devoir d'en faire bénéficier le contemporain moins favorisé, non? Je vous causerai des nanas que j'ai honorées de ma présence. Les Italiennes, tenez, ardentes, mais prudentes ! Elles sont comme leurs bagnoles, c'est l'allumage qu'est délicat. Faut pas leur brusquer la vis platinée, ni leur tarabuster le delco si on veut du rendement. La carburation se fait mal quand on a le malheur d'être impatient. L'Allemande ! Oh ! oui, promis, je vous raconterai l'Allemande, vachasse en diable et pas remuante, dont les seules qualités sont la facilité et la gentillesse. Et puis je dirai aussi de l'Anglaise, moche toujours (même les jolies quand on y regarde de près) mais si merveilleusement refoulée qu'on lui fait jaillir l'impudeur rien qu'en appuyant dessus ! Je ferai un tour d'horizon bien complet. Je me documenterai avant d'écrire pour combler mes lagunes comme disent les Vénitiens. Je causerai de l'Américaine, mauvaise affaire s'il en est, maladroite et fantasque, pudibonde et faussement exaltée. Je causerai de l'Espagnole, à peine renversable et tellement farouche qu'il faut toujours troquer son Rasurel contre une cotte de mailles avant de s'y aventurer. Vous verrez comme ça sera passionnant, éducatif et tout !
En attendant, la chère Valérie me conduit vers sa demeure à roulettes. Elle a remisé son domaine en bordure de la plage, à l'écart, sous des arbres aux lourds panaches.
— Vous n'avez pas peur de la solitude, complimenté-je.
— Il n'arrive quelque chose qu'aux femmes qui ont peur, m'assure la délicieuse enfant, en ouvrant la porte arrière de son fourgon british.