Читаем Orchéron полностью

Orchéron pensait qu’il allait devenir fou. Cela faisait maintenant deux jours et trois nuits qu’il était prisonnier du dernier étage de la construction. Il n’avait pas trouvé le moyen de descendre, et la petite djemale n’était pas revenue le chercher, contrairement à ce qu’elle lui avait promis. Elle avait certes voulu lui donner une leçon – et prendre une revanche sur lui qui, stupidement, lui avait laissé croire qu’il avait déchiffré tout seul le mystère des puits de gravité –, mais elle n’aurait sûrement pas prolongé le jeu pendant deux jours et deux nuits supplémentaires. À moins d’être totalement inconsciente, ce dont elle ne donnait pas l’impression.

Il avait d’abord essayé de descendre par où il était arrivé, mais il n’avait réussi qu’à monter au troisième et dernier étage de la construction, un niveau d’un seul tenant, vide, dont l’utilité lui échappait. Il en avait observé chaque recoin, chaque dalle, chaque bloc, sans rien découvrir qui pût de près ou de loin ressembler à une sortie, un passage. Il avait alors alterné les périodes de découragement et les crises de colère, parfois si véhémentes qu’il se cognait la tête contre les murs. Ses accès de violence avaient effrayé la créature qui s’était détachée de lui à plusieurs reprises, s’était éloignée d’une démarche dandinante quelques pas plus loin pour le fixer de ses grands yeux noirs et insondables. Il en avait éprouvé une telle sensation de déchirement, de froid, d’abandon, qu’il s’était allongé sur le plancher, vidé de ses forces, jusqu’à ce qu’elle revienne le lécher et s’enrouler autour de son torse. Il avait compris qu’elle ressentait le besoin de lui nettoyer la peau avant de se coller à lui comme un vêtement.

Il s’était efforcé de recouvrer son calme, avait tenté de sauter à pieds joints dans l’orifice central en espérant que l’élan lui conférerait le supplément de poids nécessaire pour vaincre l’apesanteur, mais à chaque fois il s’était inexorablement envolé et était retombé en douceur sur le plancher après une élévation d’une hauteur équivalente à deux hommes.

Il avait adopté une autre méthode : il avait agrippé le bord de l’ouverture, était parvenu à y glisser les jambes en luttant pied à pied contre le courant ascendant, à passer tout le corps, mais, dès qu’il avait lâché, il avait été inexorablement happé et projeté vers le haut. À la tombée de la nuit suivante, il avait admis que le puits d’apesanteur était seulement prévu pour la montée, qu’il existait un autre système pour la descente, qu’il devait se triturer les méninges pour trouver la solution. La petite djemale – Alma – avait beau le prendre pour un demeuré, il n’était pas – il ne se croyait pas – plus idiot qu’elle. Taraudé par la faim et la soif, il avait fini par s’endormir en espérant qu’elle était moins mauvaise qu’elle n’en avait l’air, qu’elle réapparaîtrait le lendemain matin avec cet agaçant petit sourire de triomphe qui ne parvenait qu’à accentuer son air pincé. Étrange tout de même que cette fille, qui prétendait avoir rencontré le Qval des légendes de l’Estérion, fit preuve d’une telle agressivité, d’un tel dédain.

Le lendemain, après une nuit agitée, il avait pensé qu’il était certainement arrivé quelque chose à Alma et, elle avait beau se montrer plus désagréable que les pires pestes du mathelle de sa mère, il avait éprouvé un douloureux pincement d’inquiétude. Pas seulement parce qu’il avait besoin d’elle, mais parce qu’en sa présence il brûlait d’un peu de ce feu vital qui l’avait embrasé avec Mael. Il ne s’agissait pas d’attirance, encore moins de désir, mais d’un frottement fécond, comme la friction à la fois horripilante et étincelante de deux pierres abrasives.

Il avait à nouveau examiné une à une les dalles du parquet, un à un les blocs de roche translucides des murs, mais il n’avait déniché aucun indice de la sortie de l’étage. De même, il n’avait reçu aucune de ces visions fugaces et instructives qui l’avaient effleuré le premier soir où il était entré dans la construction. Il avait à nouveau perdu son sang-froid et était entré dans une rage incontrôlable semblable à celles qui caractérisaient le début de ses crises. La créature s’était aussitôt séparée et éloignée de lui, mais il ne s’était pas apaisé pour autant, il avait poussé une série de hurlements, tiré son couteau, déplié la lame et donné des coups devant lui, comme s’il pourchassait d’invisibles adversaires. Il avait fini par s’effondrer, aussi faible qu’un nouveau-né, terrassé par une souffrance indicible. La créature était revenue le lécher et s’enrouler autour de son torse en se faufilant comme de l’eau entre le plancher et son dos. Il en avait ressenti un soulagement immédiat et pris conscience que, contrairement aux belladores de Cent-Sources, elle avait la capacité de régénérer ses blessures profondes.

Перейти на страницу:

Все книги серии Abzalon

Похожие книги

Аччелерандо
Аччелерандо

Сингулярность. Эпоха постгуманизма. Искусственный интеллект превысил возможности человеческого разума. Люди фактически обрели бессмертие, но одновременно биотехнологический прогресс поставил их на грань вымирания. Наноботы копируют себя и развиваются по собственной воле, а контакт с внеземной жизнью неизбежен. Само понятие личности теперь получает совершенно новое значение. В таком мире пытаются выжить разные поколения одного семейного клана. Его основатель когда-то натолкнулся на странный сигнал из далекого космоса и тем самым перевернул всю историю Земли. Его потомки пытаются остановить уничтожение человеческой цивилизации. Ведь что-то разрушает планеты Солнечной системы. Сущность, которая находится за пределами нашего разума и не видит смысла в существовании биологической жизни, какую бы форму та ни приняла.

Чарлз Стросс

Научная Фантастика