Читаем Le monde inverti полностью

La première réaction de Helward fut la surprise, puis aussitôt après l’incrédulité. Moins de dix jours auparavant, il avait vu son père qui s’éloignait à cheval vers le nord… et maintenant, en cette courte période, il lui semblait que son père avait soudain horriblement vieilli. Quand il entra, son père se leva, en s’appuyant d’une main maladroite sur une chaise. Il se tourna péniblement face à Helward. Toute son apparence portait les marques d’un âge avancé. Il se tenait voûté… ses vêtements ne lui allaient pas et la main qu’il tendit était agitée de tremblements.

— Helward, mon fils, comment vas-tu ?

Ses manières avaient également changé. Il n’y avait plus trace de la méfiance à laquelle Helward était habitué.

— Père… comment te sens-tu ?

— Très bien, mon fils. Il faut que je me repose à présent, me dit le médecin. Je suis allé dans le nord une fois de trop. (Il se rassit et d’instinct Helward s’avança pour l’aider.) On me dit que tu descends vers le passé. Est-ce exact ?

— Oui, père.

— Fais bien attention, mon fils. Il y a là-bas de quoi te remuer l’esprit. Pas comme dans le futur… où est ma place.

Clausewitz avait suivi Helward et se tenait à présent sur le seuil.

— Helward, il faut que vous sachiez que l’on a administré une piqûre à votre père.

Helward se retourna.

— Comment cela ?

— Il est rentré à la ville hier soir, en se plaignant de douleurs dans la poitrine. On a diagnostiqué une angine de poitrine et on lui a injecté un calmant. Il devrait être au lit.

— Très bien. Je ne m’attarderai pas.

Helward s’agenouilla sur le plancher près de la chaise.

— Te sens-tu mieux à présent, père ?

— Je te l’ai dit… tout va bien. Ne t’en fais pas pour moi. Comment va Victoria ?

— Cela s’annonce bien.

— Une bonne fille, Victoria.

— Je lui dirai de te rendre visite, dit Helward.

C’était affreux de voir son père dans cet état. Ils bavardèrent encore quelques minutes, mais bientôt le vieillard ne parvint plus à concentrer son attention. Il finit par fermer les yeux. Helward se releva.

— Je vais chercher un médecin, dit Clausewitz en sortant précipitamment.

Quand il revint au bout de quelques instants, il était accompagné de deux administrateurs de la Médecine. Ils soulevèrent avec précaution le vieil homme et l’emportèrent dans le couloir où une civière couverte d’un drap blanc attendait.

— Est-ce qu’il se rétablira ? demanda Helward.

— On s’occupe de lui, c’est tout ce que l’on peut dire.

— Il paraît si vieux, dit Helward, sans réfléchir.

Clausewitz était lui aussi d’un âge avancé, bien que visiblement en meilleure santé que son père.

— C’est un des risques de son travail, dit Clausewitz.

Helward lui jeta un coup d’œil incisif, mais n’obtint pas d’autres éclaircissements. Clausewitz ramassa les bottes à crampons et les présenta à Helward.

— Tenez… essayez-les.

— Pour mon père… voudriez-vous demander à Victoria de lui rendre quelquefois visite ?

— Ne vous tourmentez pas. Je m’en occuperai.

<p>4</p>

Helward mit ses paquets et son matériel dans l’ascenseur et se rendit au deuxième niveau. Quand la cabine s’immobilisa, il introduisit sa clé dans le bouton de maintien de la porte et se dirigea vers la pièce que lui avait indiquée Clausewitz. Quatre femmes et un homme l’attendaient. Dès qu’il fut entré, il se rendit compte que seuls l’homme et une femme étaient des administrateurs de la cité.

On le présenta aux trois autres femmes, mais elles ne lui adressèrent qu’un bref regard et se détournèrent. Leurs expressions trahissaient une hostilité déguisée, engourdie par une indifférence comparable à celle qu’avait éprouvée Helward jusqu’à ce moment. Avant d’entrer dans la salle, il s’était peu soucié de ces femmes. Il ne s’était même pas demandé de quoi elles auraient l’air. En fait, il n’en reconnaissait aucune, mais en entendant Clausewitz en parler, assimilées dans son esprit aux femmes qu’il avait vues dans les villages en chevauchant au nord avec Collings. Ces femmes étaient en général maigres et pâles, les yeux enfoncés dans les orbites, les joues creuses, les bras osseux et la poitrine plate. Le plus souvent vêtues de chiffons répugnants, avec des mouches qui se promenaient sur leurs visages, les femmes des villages de l’extérieur étaient de bien tristes créatures.

Ces trois-ci ne présentaient aucune de ces caractéristiques. Elles portaient des vêtements de ville propres ; leurs cheveux étaient bien lavés et coiffés ; leur chair était ferme ; leurs yeux, clairs. Il eut du mal à dissimuler sa surprise en les voyant aussi jeunes : à peine plus âgées que lui. Les gens de la ville parlaient des femmes marchandées au-dehors comme d’adultes, mais celles-ci n’étaient que de très jeunes filles.

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