Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome I полностью

– Ah! sire, c’est une triomphante idée, dit la comtesse, ne pouvant cacher sa satisfaction d’avoir gagné cette première manche. Venez, sire, venez.

– Mais qui nous servira? dit le roi, cherchant inutilement un seul laquais.

– Ah! sire, dit madame du Barry, votre café vous semble-t-il plus mauvais quand c’est moi qui vous le présente?

– Non, comtesse, et je dirai même quand c’est vous qui le faites.

– Eh bien! venez donc, sire.

– Deux couverts seulement? dit le roi. Et Chon, elle a donc soupé?

– Sire, on n’aurait pas osé, sans un ordre exprès de Votre Majesté…

– Allons donc! dit le roi, en prenant lui-même une assiette et un couvert sur une étagère. Viens, petite Chon, là, en face de nous.

– Oh! sire…, dit Chon.

– Ah! oui, fais la très humble et très obéissante sujette, hypocrite! Mettez vous là, comtesse, près de moi, de côté. Quel charmant profil vous avez!

– C’est d’aujourd’hui que vous remarquez cela, monsieur la France?

– Que voulez-vous! j’ai pris l’habitude de vous regarder en face, comtesse. Décidément, votre cuisinier est un grand cordon; quelle bisque!

– J’ai donc eu raison de renvoyer l’autre?

– Parfaitement raison.

– Alors, sire, suivez mon exemple, vous voyez qu’il n’y a qu’à y gagner.

– Je ne vous comprends pas.

– J’ai renvoyé mon Choiseul, renvoyez le vôtre.

– Pas de politique, comtesse; donnez-moi de ce madère.

Le roi tendit son verre; la comtesse prit une carafe à goulot étroit, et servit le roi.

La pression fit blanchir les doigts et rougir les ongles du gracieux échanson.

– Versez longtemps et doucement, comtesse, dit le roi.

– Pour ne pas troubler la liqueur, sire?

– Non, pour me donner le temps de voir votre main.

– Ah! décidément, sire, dit la comtesse en riant, Votre Majesté est en train de faire des découvertes.

– Ma foi! oui, dit le roi, qui reprenait peu à peu sa belle humeur; et je crois que je suis tout près de découvrir…

– Un monde? demanda la comtesse.

– Non, non, dit le roi; un monde, c’est trop ambitieux, et j’ai déjà bien assez d’un royaume. Mais une île, un petit coin de terre, une montagne enchantée, un palais dont une dame de mes amies sera l’Armide, et dont toutes sortes de monstres défendront l’entrée quand il me plaira d’oublier.

– Sire, dit la comtesse en présentant au roi une carafe de vin de Champagne glacé (invention tout à fait nouvelle à cette époque) au roi, voici justement une eau puisée au fleuve Léthé.

– Au fleuve Léthé, comtesse! en êtes-vous sûre?

– Oui, sire; c’est le pauvre Jean qui l’a rapportée des enfers, où il vient de descendre aux trois quarts.

– Comtesse, dit le roi en levant son verre, à son heureuse résurrection; mais pas de politique, je vous prie.

– Alors, je ne sais plus de quoi parler, sire. et si Votre Majesté voulait raconter une histoire, elle qui raconte si bien…

– Non; mais je vais vous dire des vers.

– Des vers! s’écria madame du Barry.

– Oui, des vers… Qu’y a-t-il d’étonnant à cela?

– Votre Majesté les déteste!

– Parbleu! sur cent mille qui se fabriquent, il y en a quatre-vingt-dix mille contre moi.

– Et ceux que Votre Majesté va me dire appartiennent aux dix mille qui ne peuvent lui faire trouver grâce pour les quatre-vingt-dix mille autres?

– Non, comtesse, ceux que je vais vous dire vous sont adressés.

– À moi?

– À vous.

– Et par qui?

– Par M. de Voltaire.

– Et il charge Votre Majesté…?

– Pas du tout, il les adressait directement à Votre Altesse.

– Comment cela?… sans lettre?

– Au contraire, dans une lettre toute charmante.

– Ah! je comprends: Votre Majesté a travaillé ce matin avec son directeur des postes.

– Justement.

– Lisez, sire, lisez les vers de M. de Voltaire.

Louis XV déplia un petit papier et lut:

Déesse des plaisirs, tendre mère des Grâces,

Pourquoi veux-tu mêler aux fêtes de Paphos

Les noirs soupçons, les honteuses disgrâces?

Pourquoi médites-tu la perte d’un héros?

Ulysse est cher à la patrie;

Il est l’appui d’Agamemnon.

Sa politique active et son vaste génie

Enchaînent la valeur de la fière Ilion.

Soumets les dieux à ton empire,

Vénus, sur tous les cœurs règne par la beauté;

Cueille, dans un riant délire,

Les roses de la volupté;

Mais à nos yeux daigne sourire,

Et rends le calme à Neptune agité.

Ulysse, ce mortel aux Troyens formidable,

Que tu poursuis de ton courroux

Pour la beauté n’est redoutable

Qu’en soupirant à ses genoux.

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