Livre I (in-folio), Chapitre V (rorqual ou baleine à dos de rasoir). On sait peu de choses de cette baleine en dehors de son nom. Je l’ai aperçue au large du cap Horn. De nature repliée, elle évite également les chasseurs et les philosophes. Bien qu’elle ne soit pas lâche, elle ne montre jamais autre chose que son dos qui forme une longue arête tranchante. Laissons-la courir. Je ne sais rien de plus à son sujet et personne d’autre non plus d’ailleurs.
Livre I (in-folio), Chapitre VI («sulphur bottom»). Autre gentilhomme-ermite dont le ventre a dû prendre sa couleur soufrée à racler les toits de l’enfer lorsqu’il sonde les plus grandes profondeurs. On le voit rarement, du moins je ne l’ai jamais vu ailleurs que dans les plus lointaines mers du Sud et point d’assez près pour étudier sa mine. On ne le chasse pas car il s’enfuirait avec la production de lignes de toute une corderie. On raconte à son sujet des merveilles. Adieu «sulphur bottom»! Je ne puis rien dire de plus sur toi sans mentir, et nul des plus vieux Nantuckais n’en pourrait dire davantage.
Fin du livre I (in-folio). Début du Livre II (in-octavo).
IN-OCTAVO [4]. Celui-ci embrasse les cétacés de taille moyenne parmi lesquels on compte à présent: I: le grampus – II: la baleine-pilote ou poisson noir – III: le narval – IV: le batteur – V: le tueur.
Livre II (in-octavo), Chapitre I (le grampus). Ce poisson, dont la respiration, ou plutôt le souffle d’une vigoureuse sonorité a suggéré un proverbe aux terriens, si bien qu’il soit un citoyen des profondeurs, n’est pas communément classé parmi les baleines. Mais étant donné qu’il a toutes les caractéristiques distinctives du léviathan, la plupart des naturalistes l’ont admis comme tel. Il compte parmi les in-octavo de taille moyenne, mesurant de quinze à vingt-cinq pieds de long et d’un tour de taille correspondant. Il voyage en troupes, on ne le chasse pas systématiquement, bien qu’il fournisse une quantité d’huile assez considérable et d’assez bonne qualité. Quelques baleiniers le considèrent comme annonçant à sa suite le grand cachalot.
Livre II (in-octavo), Chapitre II (le poisson noir). Je donne à tous ces poissons les noms que leur donnent familièrement les baleiniers, car ce sont en général les meilleurs. Lorsqu’un de ces noms me paraîtra vague ou inapproprié, j’en suggérerai un autre. C’est ce que je vais faire au sujet du poisson noir, ainsi appelé parce que la noirceur est le propre des cétacés. De sorte que, si vous voulez bien, nous l’appellerons baleine-hyène. Sa voracité est bien connue et les commissures internes de ses lèvres remontent de sorte qu’il paraît éternellement ricaner de manière méphistophélique. Il mesure en moyenne de seize à dix-huit pieds de long, on le trouve sous presque toutes les latitudes, il a une façon à lui de montrer en nageant son aileron dorsal courbe qui fait penser à un nez romain. Lorsqu’ils ne trouvent pas de meilleur gibier, les chasseurs de cachalots capturent parfois la baleine-hyène, afin de maintenir leur réserve d’huile inférieure pour les usages courants, tout comme les ménagères économes, lorsqu’elles se trouvent absolument seules à la maison brûlent un suif malodorant plutôt qu’une cire parfumée. Bien que leur couche de lard soit mince, quelques-unes de ces baleines donnent parfois jusqu’à trente gallons d’huile.