Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome IV полностью

Lorsque les portes furent soigneusement fermées, Philippe attendit un geste de son père pour commencer la conversation, et, le baron s’étant assis commodément dans le meilleur fauteuil du salon:

– Monsieur, dit Philippe, ma sœur et moi, nous allons prendre congé de vous.

– Comment cela? fit le baron très surpris. Vous… vous absentez!… Et le service?

– Il n’y a plus de service pour moi: vous savez que les promesses faites par le roi n’ont pas été réalisées… heureusement.

– Voilà un heureusement que je ne comprends pas.

– Monsieur…

– Expliquez-le-moi: comment pouvez-vous être heureux de n’être pas colonel d’un beau régiment? Vous pousseriez loin la philosophie.

– Je la pousse assez loin pour ne pas préférer le déshonneur à la fortune, voilà tout. Mais n’entrons pas, s’il vous plaît, monsieur, dans des considérations de cet ordre…

– Entrons-y, pardieu!

– Je vous en supplie…, répliqua Philippe avec une fermeté qui signifiait: «Je ne veux pas!»

Le baron fronça le sourcil.

– Et votre sœur?… Oublie-t-elle ses devoirs aussi? son service près de madame…?

– Ce sont là des devoirs qu’elle doit subordonner à d’autres, monsieur.

– De quelle nature, s’il vous plaît?

– De la plus impérieuse nécessité.

Le baron se leva.

– C’est une sotte espèce, grommela-t-il, que l’espèce des faiseurs d’énigmes.

– Est-ce bien une énigme pour vous, tout ce que je dis là?

– Absolument, répondit le baron avec un aplomb qui étonna Philippe.

– Je m’expliquerai donc: ma sœur s’en va parce qu’elle aussi est forcée de fuir pour éviter un déshonneur.

Le baron éclata de rire.

– Tudieu! les enfants modèles que j’ai là! s’écria-t-il. Le fils abandonne l’espoir d’un régiment parce qu’il craint le déshonneur, la fille abandonne un tabouret tout acquis parce qu’elle a peur du déshonneur. En vérité, me voilà revenu au temps de Brutus et de Lucrèce! De mon temps, mauvais temps sans doute, et il ne vaut pas les beaux jours de la philosophie, quand un homme voyait venir de loin un déshonneur, et qu’il portait, comme vous, une épée au côté, et quand, comme vous, il avait pris des leçons de deux maîtres et de trois prévôts, il embrochait le premier déshonneur à la pointe de son épée.

Philippe haussa les épaules.

– Oui, c’est assez pauvre, ce que je dis là, pour un philanthrope qui n’aime pas à voir couler le sang. Mais, enfin, les officiers ne sont pas précisément nés pour être philanthropes.

– Monsieur, j’ai autant que vous la conscience des nécessités qu’impose le point d’honneur; mais ce n’est pas le sang versé qui rachète…

– Phrases!… phrases de… de philosophe! s’écria le vieillard irrité au point de devenir majestueux. Je crois que j’allais dire de poltron.

– Vous avez bien fait de ne pas le dire, répliqua Philippe pâle et frémissant.

Le baron soutint fièrement le regard implacable et menaçant de son fils.

– Je disais, reprit-il, et ma logique n’est pas mauvaise autant qu’on voudrait me le faire accroire; je disais que tout déshonneur en ce monde vient, non pas d’une action, mais d’un propos. Ah! c’est ainsi!… Soyez criminel devant des sourds et devant des aveugles ou des muets, serez-vous déshonoré? Vous allez me répondre par ce vers stupide:

Le crime fait la honte et non pas l’échafaud.

C’est bon à dire à des enfants ou à des femmes; mais à un homme, mordieu! l’on parle un autre langage… Or, je me figurais, moi, avoir créé un homme… Maintenant que l’aveugle voie, que le sourd ait pu entendre, que le muet parle, et vous frappez sur la garde de votre épée, et vous crevez les yeux à l’un, le tympan à l’autre, vous coupez la langue au dernier; voilà comment répond à l’attaque du déshonneur un gentilhomme du nom de Taverney-Maison-Rouge!

– Un gentilhomme de ce nom, monsieur, sait toujours, entre les choses qu’il a à faire, que la première, c’est de ne pas commettre une action déshonorante: voilà pourquoi je ne répondrai pas à vos arguments. Seulement, il arrive parfois que l’opprobre est né d’un malheur inévitable; c’est le cas où nous nous trouvons, ma sœur et moi.

– Je passe à votre sœur. Si, d’après mon système, l’homme ne doit jamais fuir une chose qu’il peut combattre et vaincre, la femme aussi doit attendre de pied ferme. À quoi sert la vertu, monsieur le philosophe, sinon à repousser les attaques du vice? Où est le triomphe de cette même vertu, sinon dans la défaite du vice?

Et Taverney se remit à rire.

– Mademoiselle de Taverney a eu bien peur… n’est-ce pas?… Elle se sent donc faible… Alors…

Philippe, se rapprochant tout à coup:

– Monsieur, dit-il, mademoiselle de Taverney n’a pas été faible, elle est vaincue! Elle a succombé, elle est tombée dans un piège.

– Dans un piège?…

– Oui. Gardez, je vous prie, un peu de cette chaleur qui vous animait tout à l’heure pour flétrir ces misérables qui ont comploté lâchement la ruine de cet honneur sans tache.

– Je ne comprends pas…

– Vous allez comprendre… Un lâche, vous dis-je, a introduit quelqu’un dans la chambre de mademoiselle de Taverney…

Le baron pâlit.

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