Comme par miracle, un luth apparut dans les mains du vieillard. Il le tendit à la femme, stupéfaite.
— Mais comment sais-tu tout cela, messire ?
— Peu importe, dit-il en souriant. Chante pour nous, fille de chef.
La femme prit le luth d’une main tremblante, sans quitter des yeux le vieillard. Les premières notes s’élevèrent, mélancoliques. Tous les regards convergèrent vers elle, mais elle ne voyait rien. Lunedor chantait pour le vieil homme, et pour lui seul :
Les dernières notes retentirent dans un silence de plomb. La femme rendit le luth au vieillard et se retira dans l’ombre.
— Je te remercie, dit le vieil homme avec un sourire affectueux.
— Maintenant, tu veux bien me raconter une histoire ? demanda le petit garçon.
— Mais oui. Il était une fois, le grand dieu Paladine…
— Paladine ? interrompit l’enfant. Je n’ai jamais entendu parler de ce dieu.
Le Grand Théocrate émit un grognement. Tanis regarda Hederick. Il était rouge de colère. Le vieil homme parut ne rien remarquer.
— Paladine est un des anciens dieux, mon enfant. Il y a bien longtemps que plus personne ne le vénère.
— Pourquoi est-il parti ?
— Il n’est pas parti. Les hommes l’ont abandonné après la sombre époque du Cataclysme. Ils imputaient la destruction du monde aux dieux et non à eux-mêmes, comme il aurait fallu. N’as-tu jamais entendu le
— Oh si ! J’aime les histoires de dragons, même si papa dit qu’ils n’existent pas. Moi j’y crois. J’espère en voir un jour.
— Prends garde aux souhaits que tu formules, mon enfant, ils pourraient bien se réaliser !
— L’histoire…, pressa le petit garçon.
— Ah oui. Eh bien, un jour, Paladine entendit la prière d’un très noble chevalier, qui s’appelait Huma…
— Le Huma du
— Oui, celui-là. Huma s’était perdu dans la forêt. Il marcha si longtemps qu’il crut ne jamais revoir son pays. Il implora l’aide de Paladine, et soudain un grand cerf blanc apparut devant lui.
— Huma l’a tiré ?
— Il se préparait à le faire, mais le cœur lui manqua. L’animal était si beau. Le cerf s’éloigna en bondissant, puis s’arrêta et se retourna vers Huma comme s’il l’attendait. Huma le suivit. Jour et nuit, il marcha derrière le cerf, qui le mena jusqu’à son pays. Alors il rendit grâce au dieu Paladine…
— C’est un blasphème ! cracha une voix hargneuse.
Les têtes se tournèrent vers le Théocrate, qui avait atteint un état avancé d’ébriété.