Читаем Tango chinetoque полностью

Je m'apprête à interroger un quidam, mais il me fait signe de la boucler, vu que quelqu'un cause dans la salle à briffer sur un ton pathétique et trémolesque. Je fends la foule. Il y a là sa concierge ; le bougnat d'en bas, le sourdingue d'en haut, Alfred le coiffeur et sa dame, le beau-frère à Béru, le malingre de Nanterre avec la sœur de Berthe, impotente, importante, avachie, abîmée à jamais dans un marécage de graisse. Il y a Berthe en pleurs.

Un monsieur jaune cirrhose, décoré sur canapé, parle en faisant friser les féminines ! Il en est à la péroraison justement : « Tu fus toujours le plus généreux et le plus serviable des hommes, Alexandre-Benoît. Le plus aimant des maris. Le plus sûr des amis. Le plus consciencieux des policiers ».

On renifle. On pleure plus bruyamment. On refile son mouchoir à ceux qui ont oublié le leur. Et l'orateur de conclure : « Toute ta vie fut un modèle, Alexandre-Benoît ; ta mort restera un exemple ! »

Il se tait. Les dames font « hahu hahuuuu », et les messieurs font « hegrmmm hegrmmm ». On tombe dans les bras les uns des autres. On se mélange le chagrin, trinque avec sa peine, on se boit les larmes, on se renifle la morve à bout portant, on s'entre-déguste la détresse. La mort de mon Béru me, fout K.O. Je me sens dévasté entièrement. J'ai plus une parcelle de moi-même valide ou valable. J'embrasse une dame barbue. (j'apprendrai un instant plus tard qu'il s'agit de sa cousine Gertrude), je presse sur mon cœur un maigrichon qui vaporise du clappoir. Tout le monde s'étreint, se pétrit, se malaxe. Il y a des mains et des bouches qui me parcourent. Des pleurs qui me détrempent, des soupirs qui me décoiffent. J'embrasse Alfred dont la figure ressemble à l'ardoise d'une pissotière. J’embrasse le sourdingue dont l'appareil acoustique zonzonne comme un transformateur surmené, j'embrasse la frangine à Berthy, la monstrueuse qui chlingue l'abattoir j'embrasse son minus mari, j'embrasse ce qui m'arrive en bloc et au hasard, n'importe où sur les joues, sur le front, sur la bouche, sur le nez, dans les cheveux.

On se répartit les effusions, on se distribue l'émotion, on se l'émiette, on se la fait goûter on se l'entre-grume, on se la lèche, on se la boit, on se la décerne, on se la cerne, on patauge, on la distille, on l'alimente, on l'éclabousse. D'autres bras m'enlacent, d’autres lèvres me compostent. Je pleure aussi. J'ai un malheur qui ronronne dans ma poitrine comme le moteur d'un rasoir électrique. Je tombe dans les bras du père Pinaud ; pas encore aperçu. Une vraie loque ! Déjà au rebu ; il fait cuvée-réservée-de-poubelle ! Mais alors dans l'épicentre du malheur il est plus fréquentable. Ce sont ses fringues qui lui conservent encore un brin d'apparence humaine. Autrement il ressemblerait à un mollusque gantelant. Il hoquète, il suffoque. « On retrouvera jamais le même, il prophétise. Il n'y a eu qu'un Bérurier dans l'histoire humaine, il ne saurait y en avoir d'autre. Ou alors des ersatz, des succédanés, de la copie non conforme, de la décalcomanie, de Béru de plomb ! »

Tout de même, malgré la peine qui me broie, je veux demander comment, c'est arrivé ce grand malheur, ce qui lui est arrivé, à Béru. Un homme en pleine santé, un roc dans la force de l'âge… Mourir brutalement (Je ne suis resté absent que quatre jours.), c'est pas concevable !

Juste au moment où je me rassemble l'énergie d'une question, une voix s'élève, à l'autre bout de la pièce.

— Que cela nous empêche tout de même pas d'écluser un gorgeon en bectant un bout de sauciflard, les gars !

Je me pétrifie, me solidifie, me minéralise, me marmore. Cette voix, j'en suis certain, c'est celle du Gros. Un enregistrement ?

Je veux savoir, mais Berthy, qui vient de m'apercevoir, me bondit sur le poiluchard comme une avalanche. Je suis prisonnier de ses jambons et de son mufle avide. Elle me comprime, m'opprime, m'oppresse, me compresse et se déprime sur moi. Ses bajoues me recouvrent. Ses larmes me poissent. Sa bouche me ventouse. Elle va me broyer, la frénétique, me déguiser en pâte et me croquer de son gosier boatien. Je vais disparaître en elle à jamais, absorbé comme en des sables mouvants.

— Vous, vous ! Bave-t-elle. Comme c'est gentil d'être accouru !

J'ai tellement besoin d'un soutien ! Ça fait des années qu'elle me convoite, la redoutable ogresse, des années qu'elle rate pas une occase de me sauter au cou. Je veux la refouler, c'est pas possible. Elle me jugule et m'obstrue. Je veux parler, elle me bouge les questions dans la bouche ! Je veux opérer ma reddition, lever les bras, faire camarade, impossible ! Je suis pris dans cette tornade vivante. On n'allume pas sa cigarette au cœur d'un cyclone. Me voilà devenu fétu, redevenu fœtus.

Je tombe à pic, je coule à pic, je sombre, sombre héros sans sombrero ! Mais la voix de la délivrance claironne :

— Bouffe-le pas tout cru, Berthy, y peut encore faire de l'usage.

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