Читаем Le passager полностью

Janusz chercha une cabine, serrant contre sa poitrine sa serviette, son savon, ses nouvelles fringues. Pour la première fois, les odeurs abjectes reculaient au profit d’effluves de nettoyant industriel. Mais les visions d’horreur étaient toujours là. Sans leurs guenilles, les clochards diminuaient de moitié. Ils révélaient des profils de squelettes, gris, rouges, bleuâtres. Des blessures, des croûtes, des infections dessinaient des motifs sombres sur leur peau tavelée.

Pas de cabine libre. Un assistant le plaça au bout des lavabos, lui ordonnant de se déshabiller. Janusz refusa. Pas question d’ôter ses vêtements ici : il portait toujours ses colliers anti-puces et ne voulait pas dévoiler son corps sain, bien nourri — 78 kilos pour 1,80 mètre — qui le trahirait au premier coup d’œil. Sans compter son fric et son couteau…

Les autres se faisaient aider par les assistants, qui les déshabillaient avec prudence. La peau venait souvent avec le tissu. Durant des semaines, des mois, des années parfois, ces hommes n’avaient pas retiré leurs hardes, provoquant des mutations terrifiantes. Un vieillard déroulait lentement ses chaussettes, mi-fibres, mi-chair. Ses mollets abritaient une irritation à vif qui portait le dessin précis des mailles.

— À toi. Celle-là est libre !

Janusz se mit en marche mais des cris percèrent parmi les nuages de fumée. Sous les lavabos, un infirmier, un genou au sol, soutenait un homme inanimé. Un autre arrivait à la rescousse, ses bottes claquant dans les flaques.

— Faut l’envoyer à l’hosto d’urgence.

— Qu’est-ce qu’il a ?

En guise de réponse, l’agent tendit le bras du clochard, noirci par la gangrène.

— Plus on attend, plus faudra couper haut.

Janusz faillit proposer son aide mais un agent l’interpella à nouveau :

— T’y vas, toi, ou faut que je te le chante ? La 6 est libre.

Il avança. Il vit encore un handicapé, accroché à ses béquilles sous le jet crépitant de la douche. Un autre évanoui qu’un infirmier lavait au balai-brosse.

— Allez, allez ! hurla un surveillant en frappant les portes. On va pas y passer la nuit !

Janusz plongea dans sa cabine et verrouilla la porte. Il se déshabilla. Mit à l’abri son cash. Ôta ses colliers. Quand l’eau l’enveloppa, il se sentit enfin à l’abri. Le jet du pommeau, la chaleur… Il se nettoya avec une rage sourde, se racla la peau, s’essuya puis s’habilla. Il glissa son couteau et son argent dans les plis de ses nouveaux vêtements. Il se sentait propre. Régénéré. Comme neuf.

L’étape suivante, c’était le mess. Une baraque de chantier située au fond de la cour, occupée par une vingtaine de tables dont les murs étaient tapissés de polyane. Il régnait ici un calme relatif. Ces alcooliques à qui on avait pris leur litron n’avaient plus qu’un seul choix : manger et dormir au plus vite pour ne pas souffrir du manque.

À droite, se déployait un comptoir où on distribuait des plateaux-repas. Janusz prit la file d’attente. Le lieu était bondé. Et surchauffé. À la puanteur des hommes, s’ajoutait la puanteur de la bouffe. Une odeur de graillon qui épaississait l’atmosphère comme un brouillard. Il trouva une place à une table et vida son assiette sans regarder ce qu’il mangeait. Il était maintenant comme les autres. Démoli par une journée de froid et d’alcool, ramolli par la douche, gagné par le sommeil.

Mais une idée émergeait encore. Personne ne le reconnaissait. Pas une fois, dans ce QG de la cloche, un gars ne l’avait distingué. Faisait-il fausse route ? Il verrait demain. Pour l’instant, il n’aspirait qu’à une chose : s’effondrer dans un lit.

Il suivit le mouvement et rejoignit le bloc des grands marginaux. Les chambres étaient propres. Huit places pour quatre lits gigognes. Du lino au sol, qui pouvait amortir les chutes — les clochards roulaient de leur couchette ou continuaient à se battre dans les chambres. Il choisit un lit inférieur. Il préférait être près du sol pour s’enfuir, le cas échéant, en toute rapidité.

Le matelas était revêtu d’une housse jetable de poudre de riz. Il se coucha et s’enfouit sous la couverture, serrant le manche de son Eickhorn comme un enfant sa peluche. La lumière restait allumée. Ça hurlait et ça grognait dans le couloir. Tout le monde s’installait.

Janusz se dit qu’avec un tel raffut, il lui serait facile de veiller d’un œil.

La seconde suivante, il dormait d’un sommeil noir.

<p>44</p>

— MONSIEUR SAEZ ? Je suis Anaïs Chatelet, capitaine de police à Bordeaux.

Un temps.

— Comment avez-vous eu mon numéro ?

Elle ne daigna pas répondre. Un temps.

— Qu’est-ce que vous voulez ?

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