Читаем Le Comte de Monte-Cristo. Tome IV полностью

– Ah! madame, dit Villefort, vous oubliez qu’il fallait donner une mère à cette pauvre enfant qui n’en avait plus.

– Une belle-mère n’est jamais une mère monsieur! Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit, il s’agit de Valentine; laissons les morts tranquilles.»

Tout cela était dit avec une telle volubilité et un tel accent, qu’il y avait quelque chose dans cette conversation qui ressemblait à un commencement de délire.

«Il sera fait selon votre désir, madame, dit Villefort et cela d’autant mieux que votre désir est d’accord avec le mien; et, aussitôt l’arrivée de M. d’Épinay à Paris…

– Ma bonne mère, dit Valentine, les convenances, le deuil tout récent… voudriez-vous donc faire un mariage sous d’aussi tristes auspices?

– Ma fille, interrompit vivement l’aïeule, pas de ces raisons banales qui empêchent les esprits faibles de bâtir solidement leur avenir. Moi aussi, j’ai été mariée au lit de mort de ma mère, et n’ai certes point été malheureuse pour cela.

– Encore cette idée de mort! madame, reprit Villefort.

– Encore! toujours!… Je vous dis que je vais mourir, entendez-vous! Eh bien, avant de mourir, je veux avoir vu mon gendre; je veux lui ordonner de rendre ma petite-fille heureuse; je veux lire dans ses yeux s’il compte m’obéir; je veux le connaître enfin, moi! continua l’aïeule avec une expression effrayante, pour le venir trouver du fond de mon tombeau s’il n’était pas ce qu’il doit être, s’il n’était pas ce qu’il faut qu’il soit.

– Madame, dit Villefort, il faut éloigner de vous ces idées exaltées, qui touchent presque à la folie. Les morts, une fois couchés dans leur tombeau, y dorment sans se relever jamais.

– Oh! oui, oui, bonne mère, calme-toi! dit Valentine.

– Et moi, monsieur, je vous dis qu’il n’en est point ainsi que vous croyez. Cette nuit j’ai dormi d’un sommeil terrible; car je me voyais en quelque sorte dormir comme si mon âme eût déjà plané au-dessus de mon corps: mes yeux, que je m’efforçais d’ouvrir, se refermaient malgré moi; et cependant je sais bien que cela va vous paraître impossible, à vous, monsieur, surtout; eh bien, mes yeux fermés, j’ai vu, à l’endroit même où vous êtes, venant de cet angle où il y a une porte qui donne dans le cabinet de toilette de Mme de Villefort, j’ai vu entrer sans bruit une forme blanche.

Valentine jeta un cri.

«C’était la fièvre qui vous agitait, madame, dit Villefort.

– Doutez si vous voulez, mais je suis sûre de ce que je dis: j’ai vu une forme blanche; et comme si Dieu eût craint que je ne récusasse le témoignage d’un seul de mes sens, j’ai entendu remuer mon verre, tenez, tenez, celui-là même qui est ici, là, sur la table.

– Oh! bonne mère, c’était un rêve.

– C’était si peu un rêve, que j’ai étendu la main vers la sonnette, et qu’à ce geste l’ombre a disparu. La femme de chambre est entrée alors avec une lumière. Les fantômes ne se montrent qu’à ceux qui doivent les voir: c’était l’âme de mon mari. Eh bien, si l’âme de mon mari revient pour m’appeler, pourquoi mon âme, à moi, ne reviendrait-elle pas pour défendre ma fille? Le lien est encore plus direct, ce me semble.

– Oh! madame, dit Villefort, remué malgré lui jusqu’au fond des entrailles, ne donnez pas l’essor à ces lugubres idées; vous vivrez avec nous, vous vivrez longtemps heureuse, aimée, honorée, et nous vous ferons oublier…

– Jamais! jamais! jamais! dit la marquise. Quand revient M. d’Épinay?

– Nous l’attendons d’un moment à l’autre.

– C’est bien; aussitôt qu’il sera arrivé, prévenez-moi. Hâtons-nous, hâtons-nous. Puis, je voudrais aussi voir un notaire pour m’assurer que tout notre bien revient à Valentine.

– Oh! ma mère, murmura Valentine en appuyant ses lèvres sur le front brillant de l’aïeule, vous voulez donc me faire mourir? Mon Dieu! vous avez la fièvre. Ce n’est pas un notaire qu’il faut appeler, c’est un médecin!

– Un médecin? dit-elle en haussant les épaules, je ne souffre pas; j’ai soif, voilà tout.

– Que buvez-vous, bonne maman?

– Comme toujours, tu le sais bien, mon orangeade. Mon verre est là sur cette table, passe-le-moi, Valentine.»

Valentine versa l’orangeade de la carafe dans le verre et le prit avec un certain effroi pour le donner à sa grand-mère, car c’était ce même verre qui, prétendait-elle, avait été touché par l’ombre.

La marquise vida le verre d’un seul trait.

Puis elle se retourna sur son oreiller en répétant:

«Le notaire! le notaire!»

M. de Villefort sortit. Valentine s’assit près du lit de sa grand-mère. La pauvre enfant semblait avoir grand besoin elle-même de ce médecin qu’elle avait recommandé à son aïeule. Une rougeur pareille à une flamme brûlait la pommette de ses joues, sa respiration était courte et haletante, et son pouls battait comme si elle avait eu la fièvre.

C’est qu’elle songeait, la pauvre enfant, au désespoir de Maximilien quand il apprendrait que Mme de Saint-Méran, au lieu de lui être une alliée, agissait sans le connaître, comme si elle lui était ennemie.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Отверженные
Отверженные

Великий французский писатель Виктор Гюго — один из самых ярких представителей прогрессивно-романтической литературы XIX века. Вот уже более ста лет во всем мире зачитываются его блестящими романами, со сцен театров не сходят его драмы. В данном томе представлен один из лучших романов Гюго — «Отверженные». Это громадная эпопея, представляющая целую энциклопедию французской жизни начала XIX века. Сюжет романа чрезвычайно увлекателен, судьбы его героев удивительно связаны между собой неожиданными и таинственными узами. Его основная идея — это путь от зла к добру, моральное совершенствование как средство преобразования жизни.Перевод под редакцией Анатолия Корнелиевича Виноградова (1931).

Виктор Гюго , Вячеслав Александрович Егоров , Джордж Оливер Смит , Лаванда Риз , Марина Колесова , Оксана Сергеевна Головина

Проза / Классическая проза / Классическая проза ХIX века / Историческая литература / Образование и наука
1984. Скотный двор
1984. Скотный двор

Роман «1984» об опасности тоталитаризма стал одной из самых известных антиутопий XX века, которая стоит в одном ряду с «Мы» Замятина, «О дивный новый мир» Хаксли и «451° по Фаренгейту» Брэдбери.Что будет, если в правящих кругах распространятся идеи фашизма и диктатуры? Каким станет общественный уклад, если власть потребует неуклонного подчинения? К какой катастрофе приведет подобный режим?Повесть-притча «Скотный двор» полна острого сарказма и политической сатиры. Обитатели фермы олицетворяют самые ужасные людские пороки, а сама ферма становится символом тоталитарного общества. Как будут существовать в таком обществе его обитатели – животные, которых поведут на бойню?

Джордж Оруэлл

Классический детектив / Классическая проза / Прочее / Социально-психологическая фантастика / Классическая литература