Читаем La vie devant soi полностью

L'autre garde du corps avait une tête encore intacte mais c'était dommage. Moi j'aime pas les gens qui ont des visages où ça change tout le temps et fuit de tous les côtés et qui n'ont jamais la même gueule deux fois de suite. Un faux jeton, on appelle ça, et bien sûr, il devait avoir ses raisons, qui n'en a pas, et tout le monde a envie de se cacher, mais celui-là je vous jure avait l'air tellement falsifié qu'on avait les cheveux qui se dressaient sur la tête rien qu'à penser ce qu'il devait cacher. Vous voyez ce que je veux dire? Par-dessus le marché, il me souriait tout le temps et c'est pas vrai que les Noirs mangent des enfants dans leur pain, c'est des rumeurs d'Orléans, tout ça, mais j'avais toujours l'impression que je lui donnais de l'appétit et ils ont quand même été cannibaux en Afrique, on peut pas leur enlever ça. Quand je passais à côté de lui, il me saisissait, il me prenait sur ses genoux et il me disait qu'il avait un petit garçon qui avait mon âge et qu'il lui avait même offert une panoplie de cow-boy dont j'ai toujours eu envie. Une vraie ordure, quoi. Peut-être qu'il y avait du bon en lui, comme dans tout le monde quand on fait des recherches, mais il me foutait les chocot-tes, avec ses yeux qui n'avaient pas de sens unique deux fois de suite. Il devait le savoir, parce qu'il m'avait même apporté une fois des pistaches, tellement il mentait bien. Les pistaches, ça ne veut rien dire du tout, c'est un franc tout compris. S'il se croyait faire un ami avec ça, il se trompait, croyez-moi. Je raconte ce détail parce que c'est dans ces circonstances indépendantes de ma volonté que j'ai fait une nouvelle crise de violence.

Monsieur N'Da Amédée venait toujours se faire dicter le dimanche. Ce jour-là les femmes ne se défendent pas, c'est la trêve des confiseurs, et il y en avait toujours une ou deux à la maison qui venaient chercher leur môme pour l'emmener respirer dans un jardin public ou l'inviter à déjeuner. Je peux vous dire que les femmes qui se défendent sont parfois les meilleures mères du monde, parce que ça les change des clients et puis un morne, ça leur donne un avenir. Il y en a qui vous laissent tomber, bien sûr, et on n'en entend plus parler mais ça ne veut pas dire qu'elles ne sont pas mortes et n'ont pas d'excuses. Elles ramenaient parfois leurs mômes seulement le lendemain midi, pour les garder le plus longtemps possible, avant de reprendre le travail. Ce jour-là, il n'y avait donc à la maison que les mômes qui étaient les permanents, et ça faisait surtout moi et Banania, qui ne payait plus depuis un an mais qui s'en foutait complètement et faisait comme chez lui. Il y avait aussi Moïse mais il était déjà en instance dans une famille juive qui voulait seulement s'assurer qu'il n'avait rien d'héréditaire, comme j'ai eu l'honneur, parce que c'est la première chose à laquelle il faut penser avant de se mettre à aimer un morne si on ne veut pas être embêté plus tard. Le docteur Katz lui avait fait un certificat mais ces gens-là voulaient bien regarder avant de plonger. Banania était encore plus heureux que d'habitude, il venait de découvrir sa quéquette et c'était la première chose qui lui arrivait. J'apprenais des trucs auxquels je ne comprenais absolument rien mais Monsieur Hamil me les avait écrits de sa main et ça n'avait pas d'importance. Je peux vous les réciter encore parce que ça lui ferait plaisir: elli habb allah la ibri ghirhou soubhân ad daim là iazoul… Ça veut dire celui qui aime Dieu ne veut rien d'autre que Lui. Moi, je voulais bien plus, mais Monsieur Hamil me faisait travailler ma religion, car même si je restais en France jusqu'à ce que mort s'ensuive, comme Monsieur Harnil lui-même, il fallait me rappeler que j'avais un pays à moi et ça vaut mieux que rien. Mon pays, ça devait être quelque chose comme l'Algérie ou le Maroc, même si je ne figurais nulle part du point de vue documentaire. Madame Rosa en était sûre, elle ne m'élevait pas comme Arabe pour son plaisir. Elle disait aussi que pour elle, ça ne comptait pas, tout le monde était égaux quand on est dans la merde, et si les Juifs et les Arabes se cassent la gueule, c'est parce qu'il ne faut pas croire que les Juifs et les Arabes sont différents des autres, et c'est justement la fraternité qui fait ça, sauf peut-être chez les Allemands où c'est encore plus. J'ai oublié de vous dire que Madame Rosa gardait un grand portrait de Monsieur Hitler sous son lit et quand elle était malheureuse et ne savait plus à quel saint se vouer, elle sortait le portrait, le regardait et elle se sentait tout de suite mieux, ça faisait quand même un gros souci de moins.

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