Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome IV полностью

Puis il reprit son chemin, refusant toujours les propositions des voiturins, qui ne comprenaient pas qu’un jeune homme si proprement mis économisât quinze sous aux dépens de son cirage à l’œuf.

Qu’eussent-ils dit s’ils eussent su que ce jeune homme, qui allait ainsi à pied, avait dans sa poche trois cent mille livres?

Mais Gilbert avait ses raisons pour aller à pied. D’abord, à cause de la ferme résolution qu’il avait prise de ne pas excéder d’un liard le strict nécessaire; ensuite, le besoin d’isolement pour se livrer plus commodément à la pantomime et aux monologues.

Dieu seul sait tout ce qu’il se joua de dénouement heureux dans la tête de ce jeune homme, pendant les deux heures et demie qu’il marcha.

En deux heures et demie, il avait fait plus de quatre lieues, et cela sans s’apercevoir de la distance, sans ressentir la moindre fatigue, tant c’était une puissante organisation que celle de ce jeune homme.

Tous ses plans étaient faits, et il s’était arrêté à cette façon d’introduire sa demande:

Aborder le père Taverney avec de pompeuses paroles; puis, quand il aurait l’autorisation du baron, mademoiselle Andrée, avec des discours d’une telle éloquence, que non seulement elle pardonnât, mais encore qu’elle conçût du respect et de l’affection pour l’auteur de la pathétique harangue qu’il avait préparée.

À force d’y songer, l’espérance avait pris le dessus sur la crainte, et il semblait impossible à Gilbert qu’une fille, dans la position où se trouvait Andrée, n’acceptât point la réparation offerte par l’amour, quand cet amour se présentait avec une somme de cent mille écus.

Gilbert, bâtissant tous ces châteaux en Espagne, était naïf et honnête comme le plus simple enfant des patriarches. Il oubliait tout le mal qu’il avait fait, ce qui était peut-être d’un cœur plus honnête qu’on ne le pense.

Toutes ses batteries préparées, il arriva, le cœur dans un étau, sur le territoire de Trianon. Une fois là, il était prêt à tout: aux premières fureurs de Philippe, que la générosité de sa démarche devait cependant, selon lui, dissuader; aux premiers dédains d’Andrée, que son amour devait soumettre; aux premières insultes du baron, que son or devait adoucir.

En effet, Gilbert, tout éloigné de la société qu’il avait vécu, devinait instinctivement que trois cent mille livres dans la poche sont une sûre cuirasse; ce qu’il redoutait le plus, c’était la vue des souffrances d’Andrée; contre ce malheur seulement il craignait sa faiblesse, faiblesse qui lui eût ôté une partie des moyens nécessaires au succès de sa cause.

Il entra donc dans les jardins, regardant, non sans un orgueil qui allait bien à sa physionomie, tous ces ouvriers, hier ses compagnons, aujourd’hui ses inférieurs.

La première question qu’il fit porta sur le baron de Taverney. Il s’adressait naturellement au garçon de service des communs.

– Le baron n’est point à Trianon, répondit celui-ci.

Gilbert hésita un moment.

– Et M. Philippe? demanda-t-il.

– Oh! M. Philippe est parti avec mademoiselle Andrée.

– Parti! s’écria Gilbert effrayé.

– Oui.

– Mademoiselle Andrée est donc partie?

– Depuis cinq jours.

– Pour Paris?

Le garçon fit un mouvement qui voulait dire: «Je n’en sais rien.»

– Comment, vous n’en savez rien? s’écria Gilbert. Mademoiselle Andrée est partie sans qu’on sache où elle est allée? Elle n’est point partie sans cause, cependant.

– Tiens, cette bêtise! répondit le garçon peu respectueux pour l’habit marron de Gilbert; certainement qu’elle n’est point partie sans cause.

– Et pour quelle cause est-elle partie?

– Pour changer d’air.

– Pour changer d’air? répéta Gilbert.

– Oui, il paraît que celui de Trianon était mauvais pour sa santé, et, par ordonnance du médecin, elle a quitté Trianon.

Il était inutile d’en demander davantage; il était évident que le garçon des communs avait dit tout ce qu’il savait sur mademoiselle de Taverney.

Et cependant Gilbert, stupéfait, ne pouvait croire à ce qu’il entendait. Il courut à la chambre d’Andrée et trouva la porte close.

Des fragments de verre, des brins de paille et de foin, des fils de la paillasse jonchant le corridor, représentaient à sa vue tous les résultats d’un déménagement.

Gilbert rentra dans son ancienne chambre, qu’il retrouva telle qu’il l’avait laissée.

La croisée d’Andrée était ouverte pour donner de l’air à l’appartement; sa vue put plonger jusque dans l’antichambre.

L’appartement était parfaitement vide.

Gilbert alors se laissa aller à une extravagante douleur; il se heurta la tête contre la muraille, se tordit les bras, se roula sur le plancher.

Puis, comme un insensé, il s’élança hors de la mansarde, descendit l’escalier comme s’il eût eu des ailes, s’enfonça dans le bois les mains noyées dans ses cheveux, et, avec des cris et des imprécations, il se laissa tomber au milieu des bruyères, maudissant la vie et ceux qui la lui avaient donnée.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Аламут (ЛП)
Аламут (ЛП)

"При самом близоруком прочтении "Аламута", - пишет переводчик Майкл Биггинс в своем послесловии к этому изданию, - могут укрепиться некоторые стереотипные представления о Ближнем Востоке как об исключительном доме фанатиков и беспрекословных фундаменталистов... Но внимательные читатели должны уходить от "Аламута" совсем с другим ощущением".   Публикуя эту книгу, мы стремимся разрушить ненавистные стереотипы, а не укрепить их. Что мы отмечаем в "Аламуте", так это то, как автор показывает, что любой идеологией может манипулировать харизматичный лидер и превращать индивидуальные убеждения в фанатизм. Аламут можно рассматривать как аргумент против систем верований, которые лишают человека способности действовать и мыслить нравственно. Основные выводы из истории Хасана ибн Саббаха заключаются не в том, что ислам или религия по своей сути предрасполагают к терроризму, а в том, что любая идеология, будь то религиозная, националистическая или иная, может быть использована в драматических и опасных целях. Действительно, "Аламут" был написан в ответ на европейский политический климат 1938 года, когда на континенте набирали силу тоталитарные силы.   Мы надеемся, что мысли, убеждения и мотивы этих персонажей не воспринимаются как представление ислама или как доказательство того, что ислам потворствует насилию или террористам-самоубийцам. Доктрины, представленные в этой книге, включая высший девиз исмаилитов "Ничто не истинно, все дозволено", не соответствуют убеждениям большинства мусульман на протяжении веков, а скорее относительно небольшой секты.   Именно в таком духе мы предлагаем вам наше издание этой книги. Мы надеемся, что вы прочтете и оцените ее по достоинству.    

Владимир Бартол

Проза / Историческая проза