Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome III полностью

– Sire, Votre Majesté a donné le commandement de ses chevau-légers à M. le duc d’Aiguillon.

– Oui, c’est vrai, duc.

– Et pour cela il fallait toute l’énergie, toute l’habileté de Votre Majesté. C’est presque un coup État

On était à la fin du repas; le roi attendit un moment et se leva de table.

La conversation eût pu l’embarrasser, mais Richelieu était décidé à ne pas lâcher sa proie. Aussi, lorsque le roi se mit à causer avec madame de Noailles, la dauphine et mademoiselle de Taverney, Richelieu manœuvra-t-il si savamment, qu’il se retrouva en pleine conversation, conversation qu’il avait dirigée selon son gré.

– Sire, dit-il, Votre Majesté sait que les succès enhardissent.

– Est-ce pour nous dire que vous êtes hardi, duc?

– C’est pour demander à Votre Majesté une nouvelle grâce, après celle que le roi a daigné me faire; un de mes bons amis, un ancien serviteur de Votre Majesté, a son fils dans les gendarmes. Le jeune homme est plein de mérite, mais pauvre. Il a reçu d’une auguste princesse un brevet de capitaine, mais il lui manque la compagnie.

– La princesse est ma fille? demanda le roi en se retournant vers la dauphine.

– Oui, sire, dit Richelieu, et le père de ce jeune homme s’appelle le baron de Taverney.

– Mon père!… s’écria involontairement Andrée. Philippe!… C’est pour Philippe, monsieur le duc, que vous demandez une compagnie?

Puis, honteuse de cet oubli de l’étiquette, Andrée fit un pas en arrière, rougissante et les mains jointes.

Le roi se retourna pour admirer la rougeur, l’émotion de la belle enfant; il revint aussi à Richelieu avec un regard de bienveillance qui apprit au courtisan combien sa demande était agréable à cause de l’occasion qu’elle fournissait.

– En effet, dit la dauphine, ce jeune homme est charmant, et j’avais pris l’engagement de faire sa fortune. Que les princes sont malheureux! Dieu, quand il leur donne la bonne volonté, leur ôte la mémoire ou le raisonnement; ne devais-je pas penser que ce jeune homme était pauvre, que ce n’était pas assez de lui donner l’épaulette, et qu’il fallait encore lui donner la compagnie?

– Eh! madame, comment Votre Altesse l’eût-elle su?

– Oh! je le savais, répliqua vivement la dauphine avec un geste qui rappela au souvenir d’Andrée la maison si nue, si modeste, et pourtant si heureuse à son enfance; oui, je le savais, et j’ai cru avoir tout fait en donnant un grade à M. Philippe de Taverney. Il s’appelle Philippe, n’est-ce pas, mademoiselle?

– Oui, madame.

Le roi regarda toutes ces physionomies si nobles, si ouvertes; puis il arrêta les yeux sur celle de Richelieu, qui s’illuminait aussi d’un reflet de générosité qu’il empruntait sans doute à son auguste voisine.

– Ah! duc, dit-il à demi-voix, je vais me brouiller avec Luciennes.

Puis vivement, à Andrée:

– Dites que cela vous fera plaisir, mademoiselle, ajouta-t-il.

– Ah! sire, fit Andrée en joignant les mains, je vous en supplie!

– Accordé, alors, dit Louis XV. Vous choisirez une bonne compagnie à ce pauvre jeune homme, duc, et j’en ferai les fonds si déjà elle n’est toute payée et toute vacante.

Cette bonne action réjouit tous les assistants; elle valut au roi un céleste sourire d’Andrée, elle valut à Richelieu un remerciement de cette belle bouche, à qui, dans sa jeunesse, il eût demandé plus encore, ambitieux et avare comme il était.

Quelques visiteurs arrivèrent successivement; parmi eux le cardinal de Rohan, qui, depuis l’installation de la dauphine à Trianon, faisait assidûment sa cour.

Mais le roi, pendant toute la soirée, n’eut de bons égards et d’agréables paroles que pour Richelieu. Il se fit même accompagner de lui lorsqu’il prit congé de la dauphine pour retourner à son Trianon. Le vieux maréchal suivit le roi avec des tressaillements de joie.

Tandis que Sa Majesté regagnait avec le duc et ses deux officiers les allées sombres qui aboutissent au palais, Andrée avait été congédiée par la dauphine.

– Vous avez besoin d’écrire cette bonne nouvelle à Paris, avait dit la princesse; vous pouvez vous retirer, mademoiselle.

Et, précédée d’un valet de pied qui portait une lanterne, la jeune fille traversait l’esplanade de cent pas qui séparait Trianon des communs.

Devant elle aussi, de buisson en buisson, bondissait dans les feuillages une ombre qui suivait chaque mouvement de la jeune fille avec des yeux étincelants: c’était Gilbert.

Lorsque Andrée fut arrivée au perron et qu’elle commença à monter les marches de pierre, le valet retourna aux antichambres de Trianon.

Alors Gilbert, se glissant à son tour dans le vestibule, arriva aux cours des écuries, et, par un petit escalier roide comme une échelle, grimpa dans sa mansarde, située en face des fenêtres de la chambre d’Andrée, dans un angle des bâtiments.

Il vit de là Andrée appeler à l’aide une femme de chambre de madame de Noailles, qui avait sa chambre dans le même corridor. Mais, lorsque cette fille entra dans la chambre d’Andrée, les rideaux de la fenêtre tombèrent comme un voile impénétrable entre les ardents désirs du jeune homme et l’objet de ses idées.

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