En chemin, elle eut la satisfaction de rencontrer la charrette de Grégoire, l'humble transporteur qui l'avait laissée la veille dans les montagnes de Terracine, ces retrouvailles furent pour elle une grande joie. Dans les difficultés et les douleurs du monde, la fraternité crée des liens profonds qui n'existent pas dans les joies mondaines toujours fugaces et transitoires.
Grégoire lui a offert la même place à ses côtés, un geste de protection que la jeune fille a accepté bien volonté le considérant comme étant une bénédiction du ciel.
Comme deux bons vieux amis, ils ont parlé du paysage et des petits incidents de parcours, quand Grégoire lui a demandé avec intérêt :
Avez-vous d'autres parents que ceux de Fundi ? Ce n'est pas un petit sacrifice que de s'aventurer à faire un voyage aussi long que celui d'avant-hier, me semble-t-il... Comment ont- ils pu approuver que vous fassiez un autre voyage à pied ?
Oui, mon ami - a-t-elle répondu cherchant à dévier son aimable curiosité -, mes parents de Fundi sont très pauvres et je ne souhaite pas retourner à Rome sans avoir revu un oncle malade qui habite à Minturnes."
Très bien - a murmuré le généreux plébéien satisfait par cette réponse -, puisqu'il en est ainsi, je pourrai vous conduire jusqu'au bout de votre voyage aujourd'hui même car je vais au-delà des lagunes de la ville.
Leur route a continué entre les gentillesses de Grégoire et les remerciements de Célia qui appréciait sa bonté, émue.
Ce n'est qu'en fin d'après-midi que le véhicule a atteint la banlieue de la célèbre ville.
Saluant l'affectueux compagnon, la jeune chrétienne contempla le magnifique paysage qui se révélait à ses yeux. Une belle végétation côtière surgissait des terres inondables dans une abondance de fleurs. La première porte de la ville était à quelques mètres, mais son amour pour la nature la fit s'arrêter près des grands arbres sur le chemin. Le soleil qui baissait renvoyait à la vision fleurie ses rayons agonisants. Dominée par de sublimes pensées et reprenant confiance en la vie grâce aux paroles de vérité et de consolation que son grand-père lui avait apportées la veille des confins de sa tombe, elle se mit à prier, remerciant Jésus de toutes ces grâces merveilleuses et infinies.
Dans son doux ravissement, elle a dévisagé la petite figure délicate qui s'agitait dans ses bras et lui embrassa le front dans une extase de spiritualité.
La veille, ils avaient reçu l'hospitalité de la nature, mais maintenant, devant les files de taudis tout près de la route, elle se demandait quel serait le meilleur moyen de faire appel à la miséricorde de son prochain, comptant bien sûr, comme les autres fois, sur l'assistance de Jésus qui lui fournirait l'inspiration la plus juste par l'intermédiaire de ses messagers éclairés.
C'est alors qu'elle a remarqué une hutte entourée d'orangers où la vie semblait être plus simple et plus solitaire. Son modeste aspect émergeait du bois à deux cents mètres du lieu où elle se trouvait, et comme attirée par quelque détail qu'elle ne pouvait définir, Célia a atteint le sentier et a frappé à la porte. Les premières étoiles brillaient dans le ciel.
Après avoir appelé plusieurs fois, elle a senti que quelqu'un approchait avec difficulté et faisait tourner une clé dans la serrure.
Sans plus tarder, elle avait devant ses yeux surpris une figure respectable et vénérable qui l'accueillit avec sollicitude et sympathie.
C'était un vieil homme qui portait une barbe vraiment grisonnante. Sa chevelure argentée renforçait ses nobles traits romains, irréprochables. Il semblait avoir plus de soixante-dix ans, mais son regard était plein de tendresse et de vie, comme si ses facultés de jugement étaient en pleine maturité. Lui tendant des mains ridées et tremblantes, Célia a remarqué une petite croix accrochée à sa poitrine par-dessus sa toge décolorée et usée.
Profondément émue et comprenant qu'elle se trouvait devant un vieux chrétien, elle a murmuré humblement :
Loué soit Notre Seigneur Jésus-Christ !
Pour toujours, ma fille ! - a répondu l'ancien révélant par un sourire toute la joie que ce salut lui causait. - Entre dans la chaumière du misérable serf du Seigneur et dispose de celui qui est également ton serviteur.
La fille d'Helvidius Lucius lui a alors expliqué qu'elle se trouvait désemparée en ce monde avec un petit enfant de quelques jours, bénissant l'heureux instant où elle avait frappé à la porte d'un chrétien qu'elle considérerait dès lors comme un maître. Immédiatement, il s'est établi entre eux deux un sentiment mutuel de cordialité et d'affection si fort et si pur qu'il semblait trouver son origine dans l'éternité.
Entendant son histoire, l'ancien de Minturnes lui a parlé avec douceur et sincérité :