Le roi m^eme, tout vieux qu'il 'etait, ne lassait pas de la regarder, et de dire tout bas `a la reine qu'il y avait longtemps qu'il n'avait vu une si belle et si aimable dame. Toutes les dames 'etaient attentives `a consid'erer sa coiffure et ses habits, pour en avoir d`es le lendemain de semblables, pourvu qu'il se trouv^at des 'etoffes assez belles, et des ouvriers assez habiles.
Le fils du roi la mit `a la place d'honneur, et ensuite la prit pour la mener danser : elle dansa avec tant de gr^ace, qu'on l'admira encore davantage. On apporta une fort belle collation, dont le jeune prince ne mangea point, tant il 'etait occup'e `a la contempler. Elle alla s'asseoir aupr`es de ses soeurs, et leur fit mille honn^etet'es : elle leur fit part des oranges et des citrons que le Prince lui avait donn'es, ce qui les 'etonna fort, car elles ne la connaissaient point. Lorsqu'elles causaient ainsi, Cendrillon entendit sonner onze heures trois quarts : elle fit aussit^ot une grande r'ev'erence `a la compagnie, et s'en alla le plus vite qu'elle put.
5. Lisez la 5e partie et faites le devoir !
D`es qu'elle fut arriv'ee, elle alla trouver sa marraine, et apr`es l'avoir remerci'ee, elle lui dit qu'elle souhaiterait bien aller encore le lendemain au bal, parce que le fils du roi l'en avait pri'ee. Comme elle 'etait occup'ee `a raconter `a sa marraine tout ce qui s''etait pass'e au bal, les deux soeurs frapp`erent `a la porte ; Cendrillon alla leur ouvrir :
–"Que vous avez mis longtemps `a revenir !" leur dit-elle en b^aillant, en se frottant les yeux, et en s''etendant comme si elle n'e^ut fait que de se r'eveiller; elle n'avait cependant pas eu envie de dormir depuis qu'elles s''etaient quitt'ees.
–"Si tu 'etais venue au bal, lui dit une de ses soeurs, tu ne t'y serais pas ennuy'ee : il y est venu la plus belle princesse, la plus belle qu'on puisse jamais voir; elle nous a fait mille civilit'es, elle nous a donn'e des oranges et des citrons."
Cendrillon ne se sentait pas de joie : elle leur demanda le nom de cette princesse; mais elles lui r'epondirent qu'on ne la connaissait pas, que le fils du roi en 'etait fort en peine, et qu'il donnerait toutes choses au monde pour savoir qui elle 'etait. Cendrillon sourit et leur dit :
–"Elle 'etait donc bien belle ? Mon Dieu, que vous ^etes heureuses, ne pourrais-je point la voir ? H'elas ! Mademoiselle Javotte, pr^etez-moi votre habit jaune que vous mettez tous les jours."
–" Vraiment», dit Mademoiselle Javotte, " je suis de cet avis ! Pr^etez votre habit `a un vilain Cedrillon comme cela, il faudrait que je fusse bien folle."
6. Lisez la 6e partie et faites le devoir !
Cendrillon s'attendait bien `a ce refus, et elle en fut bien aise, car elle aurait 'et'e grandement embarrass'ee si sa soeur e^ut bien voulu lui pr^eter son habit. Le lendemain les deux soeurs furent au bal, et Cendrillon aussi, mais encore plus par'ee que la premi`ere fois. Le fils du roi fut toujours aupr`es d'elle, et ne cessa de lui conter des douceurs; la jeune demoiselle ne s'ennuyait point, et oublia ce que sa marraine lui avait recommand'e; de sorte qu'elle entendit sonner le premier coup de minuit, lorsqu'elle ne croyait pas qu'il f^ut encore onze heures : elle se leva et s'enfuit aussi l'eg`erement qu'aurait fait une biche. Le prince la suivit, mais il ne put l'attraper; elle laissa tomber une de ses pantoufles de verre, que le prince ramassa bien soigneusement. Cendrillon arriva chez elle bien essouffl'ee, sans carrosse, sans laquais, et avec ses m'echants habits, rien ne lui 'etant rest'e de toute sa magnificence qu'une de ses petites pantoufles, la pareille de celle qu'elle avait laiss'ee tomber. On demanda aux gardes de la porte du palais s'ils n'avaient point vu sortir une princesse; ils dirent qu'ils n'avaient vu sortir personne, qu'une jeune fille fort mal v^etue, et qui avait plus l'air d'une paysanne que d'une demoiselle.
7. Lisez la 7e partie et faites le devoir !
Quand ses deux soeurs revinrent du bal, Cendrillon leur demanda si elles s''etaient encore bien diverties, et si belle dame y avait 'et'e. Elles lui dirent que oui, mais qu'elle s''etait enfuie lorsque minuit avait sonn'e, et si promptement qu'elle avait laiss'e tomber une de ses petites pantoufles de verre, la plus jolie du monde; que le fils du roi l'avait ramass'ee, et qu'il n'avait fait que la regarder pendant tout le reste du bal, et qu'assur'ement il 'etait fort amoureux de la belle dame `a qui appartenait la petite pantoufle.