Читаем Catherine Il suffit d'un Amour Tome 2 полностью

— Je ne crois pas. Je n'en ai aucune envie. Dans quelques mois, l'infante arrivera et il me faudra repartir. Alors, à quoi bon ?

— Il vous aime, vous le savez bien. 11 ne peut se passer de vous... et même il l'écrit... fit la comtesse soulignant une ligne de son ongle.

— Il l'écrit... oui ! Mais il peut se passer de moi. Connaissez-vous si mal Philippe pour croire que j'aie pu, seule depuis trois ans, suffire à son exigeante sensualité ? De nombreuses femmes ont eu et auront encore ses faveurs. Il m'aime, je sais, et je peux dire qu'il n'a jamais cessé de me désirer, plus encore maintenant qu'autrefois, je crois. Mais il y en a d'autres.

D'ailleurs, l'infante a une réputation de beauté, elle le distraira de moi.

Ermengarde prit les deux mains de Catherine et les enferma dans les siennes.

— Sincèrement, ma mie, comment envisagez- vous l'existence pour vous

? Que désirez-vous ? Que souhaitez-vous ? Je ne peux croire que, jeune comme vous l'êtes... et si belle, vous n'ayez d'autre désir que d'user vos jours auprès d'une vieille femme, au fond d'un château sinistre. Que vous refusiez le rôle humiliant de maîtresse en titre auprès d'une duchesse régnante, je le conçois. Mais pourquoi ne pas refaire votre vie ? Ils sont nombreux, je le sais, ceux qui souhaiteraient vous mener à l'autel.

— En effet ! dit Catherine avec un mélancolique sourire. Seulement moi, je n'en ai nulle envie.

— Qu'allez-vous répondre au duc ?

— Rien !... pour la simple raison que je ne sais que lui dire. Si mon vieil ami Abou-al-Khayr était là, il trouverait sans doute une superbe pensée de poète ou de philosophe pour dépeindre mon actuel état d'esprit. Je crois bien qu'il en a pour chacune des circonstances de la vie d'une âme... Mais il est loin...

Le petit médecin arabe, en effet, était reparti pour le royaume de Grenade peu après la mort de Garin, malgré l'offre d'hospitalité d'Ermengarde. Son maître, le sultan Mohammed VIII, aux prises avec d'incessantes luttes intérieures, avait réclamé le retour de son principal conseiller et ami. Et ce n'était pas sans regrets qu'Abou-al-Khayr avait quitté Catherine pour laquelle il s'était pris d'une véritable affection.

— Si, un jour, tu ne sais plus ni que faire ni où aller, viens me rejoindre.

Dans ma petite maison au bord du Génil, les citronniers et les amandiers poussent tout seuls et les rosiers embaument une grande partie de l'année. Tu seras ma sœur et je t'apprendrai la sagesse de l'Islam...

A cette heure où son destin lui semblait se diriger vers une impasse, Catherine se souvenait de ces paroles amicales et ce souvenir lui arracha un sourire.

— Ce serait peut-être cela la solution : aller rejoindre Abou-al-Khayr, connaître une autre vie...

— Pour le coup, vous êtes folle ! s'indigna Ermengarde. Avant d'arriver à Grenade, il vous faudrait traverser des pays et encore des pays : vous n'arriveriez qu'après avoir été vingt fois violée et sans doute tuée autant de fois.

Une seule suffit, répondit Catherine. Vous avez raison : restons ici et attendons. Peut-être le destin prendra-t-il la peine de me faire signe.

Mais, malgré le cadeau de Philippe, malgré sa lettre d'amour, ce Noël fut infiniment triste pour les deux femmes. Côte à côte, elles distribuèrent des présents aux paysans et aux gens du bourg, reçurent leurs vœux ; côte à côte, elles passèrent de longues heures à la chapelle, entre la crèche qu'à l'exemple de saint François d'Assise, Ermengarde installait tous les ans et le tombeau du petit Philippe. La neige ensevelissait tout le paysage. Jour après jour, en se levant et en jetant un regard par sa fenêtre, Catherine se prenait à désespérer. Il semblait que le soleil ne reviendrait jamais. Tout était froid, noir et la jeune femme sentait son cœur se glacer peu à peu.

Pourtant, sous la neige, la terre était en travail, l'hiver s'apprêtait à céder la place au printemps... et, un jour de mars, un moine monté sur une mule grise escalada le raidillon qui menait au pont-levis de Châteauvillain. Ce jour-là, les premières pousses tendres de l'herbe pointaient sur les mottes de terre brune et grasse, les premiers bourgeons éclataient aux branches nues des arbres.

À l'archer de garde qui se portait à sa rencontre, le nouveau venu demanda si Mme de Brazey résidait bien au château et, sur sa réponse affirmative, il demanda à être mené vers elle.

— Madame de Brazey me connaît bien... Annoncez le frère Étienne Chariot.

Prévenue, Catherine le fit monter aussitôt dans sa chambre. Elle était seule, Ermengarde s'étant rendue aux écuries pour une jument qui allait mettre bas.

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