Ce livre est une tentative de reconstituer l’histoire et le contexte de la construction de deux monuments de l’art roman poitevin du XIIe s. – des églises Saint-Pierre d’Aulnay et Saint-Hilaire de Melle. Au milieu du XIe siècle, en pleine réforme grégorienne, elles ont été transmises au monastère Saint Jean d’Angély et au chapitre cathédral, – tout comme beaucoup d’autres églises privées devenues la propriété de la petite noblesse pendant la période précédante. A la fin du XIIe siècle ces églises ont été reconstruites de manière très différente par rapport à la tradition antérieure. Le nouveau style architectural se caractérise par une façade plate (nommée façade-écran) ornée d’une grande figure du cavalier. Selon l'hypothèse avancée dans le livre, les anciens propriétaries, devenus ainsi patrons laïques des églises, ont largement participé à la reconstruction de ces monuments malgré la perte de leurs droits de propriété.
Le nouveau statut des églises a occasionné des changements dans l’attitude des commaditaires laïques et, en consequence, dans l’architecture et décoration des monuments. D’une part, les initiatives des aristocrates étaient limitées par les écclésiastiques, d’autre part, à un moment donné les nobles ont commencé à concevoir ces bâtiments comme leurs nécropoles familiales. Les églises devenaient ainsi les lieux de mémoire de familles seigneuriales et les manifestations visuelles de leur noblesse. La représentation du cavalier sur la façade du bâtiment, très similaire aux images que l’on peut voir sur les sceaux de XIIIe siècle de l'aristocratie locale, peut être considérée comme portrait du commanditaire de l’église et même comme le monument funéraire de son lignage. Le présent livre essaie de reconstituer dans la mesure du possible l'histoire des familles dont les membres étaient très probablement les commanditaires des églises d’Aulnay et de Melle. Il s’agit des Cadelons, vicomtes d’Aulnay, Maingots, seigneurs de Melle, et Rabioles, habitants du chateau Dampierre.
L’intêret de l’auteur consiste aussi à introduire les exemples d’Aulnay et de Melle dans un contexte historque et culturel plus vaste en étudiant les intentions et les activités des commanditaires des églises de XIIe siècle: celles-ci se reflètent dans les chartes de donation, les chroniques, les lettres, les inscriptions. Les résultats de cette démarche sont aussi pertinentes pour les situations similaires à la région de Poitou, où des églises de ce genre ont paru dans les conditions semblables. En général, l'étude révèle les premières étapes de la formation du phénomène de l’église-nécropole familiale qui devient vers la fin du Moyen Âge un élément indispensable de la représentation symbolique de la noblesse féodale.