Quant `a la partie s'erieuse des rapports de notre mission avec la cour de Turin, je n’ai pas besoin de vous assurer, Monsieur le Comte, que je ne cesserai de suivre avec une invariable fid'elit'e les recommandations que Votre Excellence a bien voulu m’adresser l’ann'ee derni`ere, `a mon d'epart de St-P'etersbourg. Je sais le prix que notre cour met `a entretenir de bons rapports avec celle de Turin et, je dois le dire, les dispositions que j’ai trouv'ees ici sont de nature `a me faciliter singuli`erement l’accomplissement de cette t^ache. Car, en d'epit de ce pu'eril diff'erend qu’il e^ut 'et'e si facile d’'eviter, les dispositions de cette cour `a notre 'egard sont, il faut le dire, les plus satisfaisantes possibles. Les grandes qualit'es de l’Empereur sont en profonde et g'en'erale v'en'eration ici, comme partout o`u pr'evaut un principe d’ordre et de conservation. Les services, rendus par la Russie `a la Maison R'egnante, sont rappel'es en toute occasion avec une franchise de reconnaissance qui ne laisse rien `a d'esirer*. En un mot, sympathie d’opinion aussi bien que l’intelligence de ses int'er^ets les plus 'evidents, tout nous rattache cette cour — et si, dans la position donn'ee, il n’y a aucun m'erite `a maintenir les rapports sur le meilleur pied possible, il y aurait, par contre, un insigne maladresse ou une fatalit'e d'ecid'ee `a amener dans ces rapports ne f^ut-ce que l’apparence de la ti'edeur ou de l’indiff'erence.
Me serait-il permis d’ajouter `a l’appui de ce que je viens de dire une particularit'e qui m’est personnelle? C’est `a votre bienveillance 'eprouv'ee, Monsieur le Comte, que je livre ma pens'ee dans toute sa candeur… Depuis mon arriv'ee `a Turin, aussi bien qu’au plus fort de la fameuse querelle, je n’ai cess'e un instant de recevoir de la part de toute la soci'et'e d’ici, et plus particuli`erement encore des personnes haut plac'ees `a la cour et dans le gouvernement, un accueil tellement gracieux, tellement empress'e, si fort en dehors des habitudes de r'eserve, que l’on attribue au caract`ere pi'emontais, que par son exag'eration m^eme cet accueil a compl`etement d'esint'eress'e ma vanit'e, en me forcant de n’y voir que ce qu’il y avait en effet, c’est-`a-dire l’expression d’une sympathie politique qui, ne sachant o`u se prendre, s’adressait, faute de mieux, `a mon humble individu.
Telle est la position pour le moment, et quoi qu’il p^ut arriver par la suite, je n’oublierai jamais, Monsieur le Comte, qu’un employ'e qui a l’honneur de servir sous vos ordres serait plus coupable que tout autre de manquer dans sa conduite de mesure, de convenance ou de mod'eration. Il prouverait par l`a qu’il est tout `a fait indigne d’appr'ecier et de suivre le mod`ele qu’il a devant les yeux.
Il ne me reste qu’un voeu `a former: c’est que Votre Excellence daigne me continuer ses bont'es, ne f^ut-ce que pour me mettre `a m^eme de m'eriter celles dont elle m’a honor'e jusqu’`a ce jour.
N’ayant dans cette saison morte et en l’absence de la cour rien de bien int'eressant `a mander d’ici, je me conformerai aux directions qui nous ont 'et'e transmises, en adressant mes rapports officiels directement `a St-P'etersbourg.
Je suis avec respect, Monsieur le Comte, de Votre Excellence le tr`es humble et tr`es ob'eissant serviteur
T. Tutchef
Турин. 6 августа 1838
Милостивый государь, граф Карл Васильевич,
Смею льстить себя надеждой, что ваше сиятельство соблаговолит простить мне мою навязчивость, принимая во внимание причину, побуждающую меня написать вам это письмо. Я узнал от своей жены о том, какой душевной заботливостью вы изволили окружить ее в такую минуту, когда она столь нуждалась в утешении, и хотя ваше благосклонное участие было вызвано положением, в котором она оказалась, и относилось лично к ней, я все же настоятельно прошу вас принять нашу общую признательность, в коей моя доля не маленькая. Я искренне разделяю радость, которую она испытывает при мысли, что из всех обращенных к ней выражений сочувствия самые сердечные и самые великодушные исходили от вас, милостивый государь.