— J’en ai bien l’intention, répondis-je.
Avant le départ de Blayne pour le nord, nous convînmes qu’une fois la crise résolue hors de la cité, nous voyagerions ensemble.
De nouveau seul, je lus d’un bout à l’autre la copie de la Directive de Destaine que Blayne avait empruntée pour moi à Clausewitz.
Elle comprenait plusieurs pages de texte imprimé serré, dont une grande partie me serait restée incompréhensible si je l’avais lue avant ma première sortie hors de la ville. Maintenant, mes propres expériences et idées s’ajoutant à ce que Blayne m’avait expliqué, elle ne constituait plus qu’une confirmation. Je compris que le système des guildes était partiellement fondé : l’expérience avait ouvert la voie de la compréhension.
Une part très importante de la Directive se composait de théories mathématiques coupées de nombreux calculs… que je ne fis que parcourir rapidement. Un journal tenu hâtivement me parut d’un tout autre intérêt. Certains paragraphes retinrent particulièrement mon attention.
Nous sommes bien loin de la Terre. Notre mère planète, je doute que nous ne la revoyions jamais, mais si nous devons survivre ici, il faut que ce soit sous la forme d’un microcosme de la Terre. Nous sommes dans la désolation et dans l’isolement. Nous sommes entourés d’un monde hostile qui menace chaque jour notre existence. Tant que nos constructions demeureront, l’homme survivra en ce lieu. La protection et la conservation de notre habitat sont donc d’une importance capitale.
Plus loin, il avait écrit :
J’ai calculé le taux de régression comme étant d’un dixième de kilomètre pendant une période de vingt-trois heures et quarante-sept minutes. Bien que cette dérive au sud soit lente, elle est inéluctable… l’installation sera donc déplacée d’au moins un kilomètre, pour toute période de dix jours.
Rien ne doit s’y opposer. Nous avons déjà rencontré une rivière et ne l’avons franchie qu’au prix de grands dangers. Sans nul doute, nous rencontrerons d’autres obstacles dans les jours et les kilomètres à venir, et par conséquent, nous devrons être prêts. Il faut concentrer nos efforts à trouver des matériaux locaux que nous puissions emmagasiner dans les bâtiments afin de nous en servir ultérieurement pour les constructions. Il ne devrait pas être trop difficile de construire un pont si nous sommes avertis en temps opportun.
Sturner est allé en exploration à l’avant et nous annonce une région marécageuse à quelques kilomètres devant nous. Nous avons déjà envoyé d’autres équipes au nord-est et au nord-ouest pour mesurer l’étendue de ce marécage. S’il n’est pas trop large, nous pourrons dévier un peu du nord exact et rattraper ensuite le temps perdu.
À la suite de ce paragraphe figuraient deux pages de la théorie que Blayne s’était efforcé de m’expliquer. Je la relus par deux fois, mais sans y trouver beaucoup plus de sens. Je passai donc à la suite :