Читаем Le Comte de Monte-Cristo. Tome IV полностью

Ses traits ne portaient pas l’empreinte de cette émotion profonde qui refoule le sang au cœur et décolore le front et les joues. Ses mains, gracieusement posées l’une sur son chapeau, l’autre dans l’ouverture de son gilet de piqué blanc, n’étaient agitées d’aucun frisson: son œil était calme et même brillant. À peine dans la salle, le regard du jeune homme se mit à parcourir tous les rangs des juges et des assistants, et s’arrêta plus longuement sur le président et surtout sur le procureur du roi.

Auprès d’Andrea se plaça son avocat, avocat nommé d’office (car Andrea n’avait point voulu s’occuper de ces détails auxquels il n’avait paru attacher aucune importance), jeune homme aux cheveux d’un blond fade, au visage rougi par une émotion cent fois plus sensible que celle du prévenu.

Le président demanda la lecture de l’acte d’accusation, rédigé, comme on sait, par la plume si habile et si implacable de Villefort.

Pendant cette lecture, qui fut longue, et qui pour tout autre eût été accablante, l’attention publique ne cessa de se porter sur Andrea, qui en soutint le poids avec la gaieté d’âme d’un Spartiate.

Jamais Villefort peut-être n’avait été si concis ni si éloquent; le crime était présenté sous les couleurs les plus vives, les antécédents du prévenu, sa transfiguration, la filiation de ses actes depuis un âge assez tendre, étaient déduits avec le talent que la pratique de la vie et la connaissance du cœur humain pouvaient fournir à un esprit aussi élevé que celui du procureur du roi.

Avec ce seul préambule, Benedetto était à jamais perdu dans l’opinion publique, en attendant qu’il fût puni plus matériellement par la loi.

Andrea ne prêta pas la moindre attention aux charges successives qui s’élevaient et retombaient sur lui: M. de Villefort, qui l’examinait souvent et qui sans doute continuait sur lui les études psychologiques qu’il avait eu si souvent l’occasion de faire sur les accusés, M. de Villefort ne put une seule fois lui faire baisser les yeux, quelles que fussent la fixité et la profondeur de son regard.

Enfin la lecture fut terminée.

«Accusé, dit le président, vos nom et prénoms?»

Andrea se leva.

«Pardonnez-moi monsieur le président, dit-il d’une voix dont le timbre vibrait parfaitement pur, mais je vois que vous allez prendre un ordre de questions dans lequel je ne puis vous suivre. J’ai la prétention que c’est à moi de justifier plus tard d’être une exception aux accusés ordinaires. Veuillez donc, je vous prie, me permettre de répondre en suivant un ordre différent; je n’en répondrai pas moins à toutes.»

Le président, surpris, regarda les jurés, qui regardèrent le procureur du roi.

Une grande surprise se manifesta dans toute l’assemblée. Mais Andrea ne parut aucunement s’en émouvoir.

«Votre âge? dit le président; répondrez-vous à cette question?

– À cette question comme aux autres, je répondrai, monsieur le président, mais à son tour.

– Votre âge? répéta le magistrat.

– J’ai vingt et un ans, ou plutôt je les aurai seulement dans quelques jours, étant né dans la nuit du 27 au 28 septembre 1817.»

M. de Villefort, qui était à prendre note, leva la tête à cette date.

«Où êtes-vous né? continua le président.

– À Auteuil, près Paris», répondit Benedetto.

M. de Villefort leva une seconde fois la tête, regarda Benedetto comme il eût regardé la tête de Méduse et devint livide.

Quant à Benedetto, il passa gracieusement sur ses lèvres le coin brodé d’un mouchoir de fine batiste.

«Votre profession? demanda le président.

– D’abord j’étais faussaire, dit Andrea le plus tranquillement du monde; ensuite je suis passé voleur, et tout récemment je me suis fait assassin.»

Un murmure ou plutôt une tempête d’indignation et de surprise éclata dans toutes les parties de la salle: les juges eux-mêmes se regardèrent stupéfaits, les jurés manifestèrent le plus grand dégoût pour le cynisme qu’on attendait si peu d’un homme élégant.

M. de Villefort appuya une main sur son front qui, d’abord pâle, était devenu rouge et bouillant, tout à coup il se leva regardant autour de lui comme un homme égaré: l’air lui manquait.

«Cherchez-vous quelque chose, monsieur le procureur du roi?» demanda Benedetto avec son plus obligeant sourire.

M. de Villefort ne répondit rien, et se rassit ou plutôt retomba sur son fauteuil.

«Est-ce maintenant, prévenu, que vous consentez à dire votre nom? demanda le président. L’affectation brutale que vous avez mise à énumérer vos différents crimes, que vous qualifiez de profession, l’espèce de point d’honneur que vous y attachez, ce dont, au nom de la morale et du respect dû à l’humanité, la cour doit vous blâmer sévèrement, voilà peut-être la raison qui vous a fait tarder de vous nommer: vous voulez faire ressortir ce nom par les titres qui le précèdent.

– C’est incroyable, monsieur le président, dit Benedetto du ton de voix le plus gracieux et avec les manières les plus polies, comme vous avez lu au fond de ma pensée; c’est en effet dans ce but que je vous ai prié d’intervertir l’ordre des questions.»

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