Читаем La vie devant soi полностью

Un peu plus tard, les frères de Monsieur Waloumba ont commencé à être découragés car Madame Rosa se foutait de tout dans son état et Monsieur Waloumba m'a expliqué que les mauvais esprits obstruaient toutes ses issues et les efforts n'arrivaient pas jusqu'à elle. On s'est tous assis par terre autour de la Juive et on a goûté un moment de repos car en Afrique ils sont beaucoup plus nombreux qu'à Belleville et ils peuvent se relayer par équipes autour des mauvais esprits comme chez Renault. Monsieur Waloumba est allé chercher des eaux-fortes et des œufs de poule et on a saucissonné autour de Madame Rosa qui avait un regard comme si elle l'avait perdu et qu'elle le cherchait partout.

Monsieur Waloumba, pendant qu'on se régalait, nous a expliqué que dans son pays il était beaucoup plus facile de respecter les vieux et de s'occuper d'eux pour les adoucir que dans une grande ville comme Paris où il y a des milliers de rues, d'étages, de trous et d'endroits où on les oublie et on ne peut pas utiliser l'armée pour les chercher partout où ils étaient car l'armée est pour s'occuper des jeunes. Si l'armée passait son temps à s'occuper des vieux, ce serait plus l'armée française. Il m'a dit que les nids de vieux, il y en a pour ainsi dire des dizaines de milliers dans les villes et à la campagne, mais il n'y a personne pour donner des renseignements qui permettraient de les trouver, et c'est l'ignorance. Un vieux ou une vieille dans un grand et beau pays comme la France, ça fait de la peine à voir et les gens ont déjà assez de soucis comme ça. Les vieux et les vieilles ne servent plus à rien et ne sont plus d'utilité publique, alors on les laisse vivre. En Afrique, ils sont agglomérés par tribus où les vieux sont très recherchés, à cause de tout ce qu'ils peuvent faire pour vous quand ils sont morts. En France il n'y a pas de tribus à cause de l'égoïsme. Monsieur Waloumba dit que la France a été complètement détribalisée et que c'est pour ça qu'il y a des bandes armées qui se serrent les coudes et essaient de faire quelque chose. Monsieur Waloumba dit que les jeunes ont besoin de tribus car sans ça ils deviennent une goutte d'eau à la mer et ça les rend dingues. Monsieur Waloumba dit que tout devient tellement grand que c'est même pas la peine de compter avant mille. C'est pourquoi les petits vieux et les petites vieilles qui ne peuvent pas faire de bandes armées pour exister disparaissent sans laisser d'adresse et vivent dans leurs nids de poussière. Personne ne sait qu'ils sont là, surtout dans les chambres de bonnes sans ascenseur, quand ils ne peuvent pas signaler leur présence par des cris parce qu'ils sont trop faibles. Monsieur Waloumba dit qu'il faudrait faire venir beaucoup de main-d'œuvre étrangère d'Afrique pour chercher les vieux tous les matins à six heures et enlever ceux qui commencent déjà à sentir mauvais, car personne ne vient contrôler que le vieux ou la vieille est encore vivant et c'est seulement lorsqu'on dit à la concierge que ça sent mauvais dans l'escalier que tout s'explique.

Monsieur Waloumba parle très bien et toujours comme s'il était le chef. Il a le visage couvert de cicatrices qui sont des marques d'importance et lui permettent d'être très estimé dans sa tribu et de savoir de quoi il parle. Il vit toujours à Belleville et un jour j'irai le voir.

Il m'a montré un truc très utile à Madame Rosa, pour distinguer une personne encore vivante d'une personne tout à fait morte. Dans ce but, il s'est levé, il a pris un miroir sur la commode et il l'a présenté aux lèvres de Madame Rosa et le miroir a pâli à l'endroit où elle a respiré dessus. On voyait pas autrement qu'elle respirait, vu que son poids était trop lourd à soulever pour ses poumons. C'est un truc qui permet de distinguer les vivants des autres. Monsieur Waloumba dit que c'est la première chose à faire chaque matin avec les personnes d'un autre âge qu'on trouve dans les chambres de bonne sans ascenseur pour voir si elles sont seulement en proie à la sénilité ou si elles sont déjà cent pour cent mortes. Si le miroir pâlit c'est qu'elles soufflent encore et il ne faut pas les jeter.

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