La vibration des moteurs à anaméson fit gémir pendant cinquantecinq heures les parois de l’astronef, jusqu’à ce que les compteurs eussent indiqué la vitesse de 970 millions de kilomètres à l’heure, proche de la limite de sécurité. La distance de l’étoile de fer augmentait de plus de vingt milliards de kilomètres en 24 heures terrestres. Il serait difficile de rendre le soulagement des treize voyageurs après les rudes épreuves subies: la planète tuée, la disparition de
Quatre mois s’écoulèrent. L’astronef suivait sa route véritable, dûment calculée, qui contournait la région des météorites libres. L’équipage, exténué par ses aventures et un pénible labeur, se refaisait dans un sommeil de sept mois. Cette fois, il y avait non plus trois, mais quatre veilleurs: à Erg Noor et Pour Hiss qui faisaient leur service, s’étaient joints Louma Lasvi et le biologiste Eon Tal.
Erg Noor qui avait surmonté les plus grosses difficultés qu’eussent jamais éprouvées les astronautes de la Terre, se sentait bien seul. C’était la première fois que quatre ans de voyage jusqu’à la Terre lui paraissaient interminables. Il ne cherchait pas à s’illusionner: son impatience tenait au fait que la Terre seule lui donnait l’espoir de sauver son astronavigatrice si dévouée et qui lui était devenue chère.
Il remettait d’un jour à l’autre ce qu’il eût fait le lendemain de l’envol: la projection des filins électroniques de la
Ces films, tournés il y avait quatrevingts ans, à huit parsecs du Soleil, et restés dans l’astronef ouvert, sur la planète noire de l’étoile T, s’étaient parfaitement conservés. L’écran hémisphérique emporta enfin les quatre spectateurs de la Tantra vers la région où Véga rayonnait dans toute sa gloire.
Les sujets se succédaient rapidement, cadres instantanés de la vie du vaisseau, dans l’éblouissante clarté du soleil bleu. Le chef de l’expédition, un tout jeune homme — vingthuit ans à peine — travaillait à la machine à calculer; des astronomes encore plus jeunes faisaient leurs observations. Voici les danses et les sports quotidiens, poussés à une perfection acrobatique. Une voix moqueuse spécifia que le record était détenu tout le long du voyage par la biologiste. En effet, cette jeune fille aux cheveux courts, blonds comme le lin, pliait dans les exercices les plus difficiles son corps superbe de gymnaste entraînée…
A voir ces images qui avaient gardé leur fraîcheur de coloris, on oubliait que les jeunes astronautes, si gais, si énergiques, étaient dévorés depuis longtemps par les horribles monstres de la planète de l’étoile de fer.