Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome IV полностью

La Martinière représentait le parti du dauphin, l’opposition. Bordeu prétendait que le simple aveu de la gravité du mal tuerait le roi et que, pour sa part, il reculait devant un régicide.

Bordeu représentait le parti du Barry.

En effet, appeler la religion chez le roi, c’était expulser la favorite. Quand Dieu entre par une porte, il faut bien que Satan sorte par l’autre.

Or, pendant toutes les divisions intestines de la Faculté, de la famille et des partis, la maladie se logeait à l’aise dans ce corps vieilli, usé, gâté par la débauche; elle s’y fortifiait de telle façon, que ni remèdes ni prescriptions ne purent la débusquer.

Dès les premières atteintes du mal causé par une infidélité de Louis XV, à laquelle madame du Barry avait prêté complaisamment la main, le roi avait vu se réunir autour de son lit ses deux filles, la favorite et les courtisans les mieux en faveur. On riait encore et l’on s’aidait.

Tout à coup parut à Versailles l’austère et sinistre figure de Madame Louise de France; elle quittait sa cellule de Saint-Denis pour venir donner aussi à son père des consolations et des soins.

Elle entra pâle et sombre comme la statue de la Fatalité; ce n’était plus une fille pour son père, une sœur pour ses sœurs; elle ressemblait aux prophétesses antiques qui, dans les jours lugubres de l’adversité, venaient crier aux rois éblouis: «Malheur! malheur! malheur!» Elle tomba dans Versailles à une heure du jour où Louis baisait les mains de madame du Barry et les appliquait comme de douces caresses sur son front malade, sur ses joues enflammées.

À son aspect, tout s’enfuit: les sœurs se réfugièrent tremblantes dans la chambre voisine; madame du Barry fléchit le genou et courut à son appartement; les courtisans privilégiés reculèrent jusqu’aux antichambres; les deux médecins seuls demeurèrent au coin de la cheminée.

– Ma fille! murmura le roi en ouvrant ses yeux fermés par la douleur et la fièvre.

– Votre fille, oui, sire, dit la princesse.

– Qui vient…

– De la part de Dieu!

Le roi se souleva, ébauchant un sourire.

– Car vous oubliez Dieu, reprit Madame Louise.

– Moi?…

– Je veux vous le rappeler.

– Ma fille! je ne suis pas assez près de la mort, j’espère, pour qu’une exhortation soit urgente. Ma maladie est légère: une courbature, un peu d’inflammation.

– Votre maladie, sire, interrompit la princesse, est celle qui, d’après l’étiquette, doit réunir au chevet de Sa Majesté les grands prélats du royaume. Quand un membre de la famille royale est atteint de la petite vérole, il doit être administré sur-le-champ.

– Madame!… s’écria le roi fort agité, fort pâle, que dites-vous?

– Madame!… firent les médecins avec terreur.

– Je dis, continua la princesse, que Votre Majesté est atteinte de la petite vérole.

Le roi poussa un cri.

– Les médecins ne l’ont pas dit, répliqua-t-il.

– Ils n’osent; moi, je vois pour Votre Majesté un autre royaume que le royaume de France. Approchez-vous de Dieu, sire, et passez en revue toutes vos années.

– La petite vérole! murmurait Louis XV; maladie mortelle!… Bordeu!… La Martinière!… est-ce donc vrai?

Les deux praticiens baissèrent la tête.

– Mais je suis perdu alors? répéta le roi, plus épouvanté que jamais.

– On guérit de toutes les maladies, sire, dit Bordeu prenant l’initiative, surtout lorsqu’on conserve sa tranquillité d’esprit.

– Dieu donne la tranquillité de l’esprit et le salut du corps, répondit la princesse.

– Madame, dit hardiment Bordeu, quoique à voix basse, vous tuez le roi!

La princesse ne daigna pas répondre. Elle se rapprocha du malade et, lui prenant la main qu’elle couvrit de baisers:

– Rompez avec le passé, sire, dit-elle, et donnez l’exemple à vos peuples. Nul ne vous avertissait; vous couriez risque d’être perdu pour l’éternité. Promettez de vivre en chrétien, si vous vivez; mourez en chrétien, si Dieu vous appelle à lui.

Elle acheva ces mots par un nouveau baiser sur la main royale et reprit à pas lents le chemin des antichambres. Là, elle rabattit son long voile noir sur son visage, descendit les degrés et monta dans son carrosse, laissant derrière elle une stupéfaction, une épouvante dont rien ne saurait donner une idée.

Le roi n’avait pu reprendre ses esprits qu’à force de questionner les médecins; mais il était frappé.

– Je ne veux pas, dit-il, que les scènes de Metz avec la duchesse de Châteauroux se renouvellent; qu’on fasse venir madame d’Aiguillon et qu’on la prie d’emmener à Rueil madame du Barry.

Cet ordre fut l’explosion. Bordeu voulut dire quelques mots; le roi lui imposa silence. Bordeu voyait, d’ailleurs, son collègue prêt à tout rapporter au dauphin; Bordeu savait l’issue de la maladie du roi, il ne lutta pas et, quittant la chambre royale, avertit madame du Barry du coup qui la frappait.

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