Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome III полностью

Au milieu du cabinet, la jeune femme s’arrêta. Ce costume, cette figure, cette démarche frappèrent le lieutenant.

– Qui êtes-vous? demanda-t-il sans se retourner, mais en regardant dans la glace; que me voulez-vous?

– Suis-je, répondit Lorenza, devant M. de Sartine, lieutenant de police?

– Oui, répondit brièvement celui-ci.

– Qui me l’affirme?

M. de Sartine se retourna.

– Sera-ce une preuve pour vous que je suis l’homme que vous cherchez, dit-il, si je vous envoie en prison?

Lorenza ne répliqua point.

Seulement, elle regarda autour d’elle avec cette inexprimable dignité des femmes de son pays, pour chercher le siège que M. de Sartine ne lui offrait pas.

Il fut vaincu par ce seul regard, car c’était un homme assez bien élevé que M. le comte d’Alby de Sartine.

– Asseyez-vous, dit-il brusquement.

Lorenza tira un fauteuil à elle et s’assit.

– Parlez vite, fit le magistrat. Voyons, que voulez-vous?

– Monsieur, dit la jeune femme, je viens me mettre sous votre protection.

M. de Sartine la regarda de ce regard narquois qui lui était particulier.

– Ah! ah! fit-il.

– Monsieur, continua Lorenza, j’ai été enlevée à ma famille et soumise, par un mariage menteur, à un homme qui, depuis trois ans, m’opprime et me fait mourir de douleur.

M. de Sartine regarda cette noble physionomie, et se sentit remué par cette voix d’un accent si doux, qu’on eût dit un chant.

– De quel pays êtes-vous? demanda-t-il.

– Romaine.

– Comment vous appelez-vous?

– Lorenza.

– Lorenza qui?

– Lorenza Feliciani.

– Je ne connais pas cette famille-là. Êtes-vous demoiselle?

Demoiselle, on le sait, signifiait, à cette époque, fille de qualité. De nos jours, une femme se trouve assez noble du moment où elle se marie; elle ne tient plus qu’à être appelée madame.

– Je suis demoiselle, dit Lorenza.

– Après? Vous demandez?…

– Eh bien! je demande justice de cet homme qui m’a incarcérée, séquestrée.

– Cela ne me regarde pas, dit le lieutenant de police; vous êtes sa femme.

– Il le dit, du moins.

– Comment, il le dit?

– Oui; mais je ne m’en souviens point, moi, le mariage ayant été contracté pendant mon sommeil.

– Peste! vous avez le sommeil dur.

– Plaît-il?

– Je dis que cela ne me regarde point; adressez-vous à un procureur et plaidez; je n’aime pas à me mêler des affaires de ménage.

Sur quoi, M. de Sartine fit de la main un geste qui signifiait: «Allez-vous-en.»

Lorenza ne bougea point.

– Eh bien? demanda M. de Sartine étonné.

– Je n’ai pas fini, dit-elle, et, si je viens ici, vous devez comprendre que ce n’est point pour me plaindre d’une frivolité; c’est pour me venger. Je vous ai dit mon pays; les femmes de mon pays se vengent et ne se plaignent pas.

– C’est différent, dit M. de Sartine; mais dépêchez-vous, belle dame, mon temps est cher.

– Je vous ai dit que je venais à vous pour vous demander protection: l’aurai-je?

– Protection contre qui?

– Contre l’homme de qui je veux me venger.

– Il est donc puissant?

– Plus puissant qu’un roi.

– Voyons, expliquons-nous, ma chère dame… Pourquoi vous accorderais-je ma protection contre un homme, de votre avis, plus puissant que le roi, pour une action qui est peut-être un crime? Si vous avez à vous venger de cet homme, vengez-vous-en. Cela m’importe peu, à moi; seulement, si vous commettez un crime, je vous ferai arrêter; après quoi, nous verrons; voilà la marche.

– Non, monsieur, dit Lorenza, non, vous ne me ferez point arrêter, car ma vengeance est d’une grande utilité pour vous, pour le roi, pour la France. Je me venge en révélant les secrets de cet homme.

– Ah! ah! cet homme a des secrets? dit M. de Sartine intéressé malgré lui.

– De grands secrets, monsieur.

– De quelle sorte?

– Politiques.

– Dites.

– Mais, enfin, me protégerez-vous, voyons?

– Quelle espèce de protection me demandez-vous? fit le magistrat avec un froid sourire: argent ou affection?

– Je demande, monsieur, à entrer dans un couvent; à y vivre ignorée, ensevelie. Je demande à ce que ce couvent devienne une tombe, mais que ma tombe ne soit jamais violée par qui que ce soit au monde.

– Ah! dit le magistrat, ce n’est pas d’une exigence bien grande. Vous aurez le couvent; parlez.

– Ainsi, j’ai votre parole, monsieur?

– Je crois vous l’avoir donnée, ce me semble.

– Alors, dit Lorenza, prenez ce coffret; il renferme des mystères qui vous feront trembler pour la sûreté du roi et du royaume.

– Ces mystères, vous les connaissez donc?

– Superficiellement; mais je sais qu’ils existent.

– Et qu’ils sont importants?

– Qu’ils sont terribles.

– Des mystères politiques, dites-vous?

– N’avez-vous jamais entendu dire qu’il existait une société secrète?

– Ah! celle des maçons?

– Celle des invisibles.

– Oui; mais je n’y crois pas.

– Quand vous aurez ouvert ce coffret, vous y croirez.

– Ah! s’écria M. de Sartine vivement, voyons.

Et il prit le coffret des mains de Lorenza.

Mais tout à coup, ayant réfléchi, il le posa sur le bureau.

– Non, dit-il avec défiance, ouvrez le coffret vous-même.

– Mais, moi, je n’en ai point la clef.

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