Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome III полностью

Gilbert regardait, ou plutôt, selon son habitude, dévorait Andrée de sa mansarde. Seulement, il eût été difficile de dire si les regards qu’il fixait sur la jeune fille étincelaient d’amour ou de haine.

Les rideaux tirés, Gilbert n’eut plus rien à voir. En conséquence, il regarda d’un autre côté.

En regardant d’un autre côté, il aperçut le plumet de M. de Beausire et reconnut l’exempt, qui se promenait en sifflotant un petit air pour tromper l’ennui de l’attente.

Au bout de dix minutes, c’est-à-dire à sept heures quarante minutes, Nicole parut: elle échangea quelques mots avec M. de Beausire, lequel fit un mouvement de tête en signe qu’il comprenait parfaitement, et s’éloigna dans la direction de l’allée creuse qui conduit au petit Trianon.

De son côté, Nicole retourna sur ses pas, légère comme un oiseau.

– Ah! ah! fit Gilbert, monsieur l’exempt et mademoiselle la femme de chambre ont quelque chose à dire ou à faire, pour laquelle chose ils craignent les témoins: bon!

Gilbert n’était plus curieux au sujet de Nicole; seulement, sentant dans la jeune fille une ennemie naturelle, il cherchait à réunir contre sa moralité une masse de preuves avec laquelle il pût victorieusement repousser l’attaque si Nicole l’attaquait.

Gilbert ne doutait pas que la campagne ne dût s’ouvrir d’un moment à l’autre et, en soldat prévoyant, il amassait des munitions de guerre.

Un rendez-vous de Nicole avec un homme, dans Trianon même, c’était une de ces armes qu’un ennemi aussi intelligent que Gilbert ne pouvait négliger de ramasser, surtout quand on avait, comme le faisait Nicole, l’imprudence de la laisser tomber à ses pieds. Gilbert voulut en conséquence recueillir le témoignage des oreilles pour l’ajouter à celui des yeux, et saisir au vol quelque phrase bien compromettante qu’il pût victorieusement braquer sur la jeune fille au moment du combat.

Il descendit donc prestement de sa mansarde, prit le couloir des cuisines et gagna le jardin par le petit escalier de la chapelle; une fois dans le jardin, Gilbert n’avait plus rien à craindre, il en connaissait tous les retraits comme un renard connaît son fourré.

Il se glissa donc sous les tilleuls, puis le long de l’espalier; puis il atteignit un massif qui s’élevait à vingt pas de l’endroit où il comptait retrouver Nicole.

Nicole y était en effet.

À peine Gilbert était-il installé dans son massif, qu’un bruit étrange parvint à son oreille: c’était le bruit de l’or sur la pierre, c’était ce retentissement métallique dont rien, sinon la réalité, ne peut donner une idée juste.

Gilbert se glissa comme un serpent jusqu’au mur en terrasse surmonté d’une haie de lilas, laquelle, au mois de mai, répandait son parfum et secouait ses fleurs sur les passants qui longeaient le mur de cette allée creuse qui sépare le grand Trianon du petit.

Arrivé à ce point, les regards de Gilbert, habitués à l’obscurité, virent Nicole qui vidait sur une pierre, en deçà de la grille, et prudemment placée hors de la portée de la main de M. de Beausire, la bourse donnée par M. de Richelieu.

Les gros louis en ruisselaient bondissants et reluisants, tandis que M. de Beausire, l’œil allumé et la main tremblante, regardait attentivement Nicole et les louis sans comprendre comment l’une possédait les autres.

Nicole parla.

– Plus d’une fois, dit-elle, vous m’avez proposé de m’enlever, mon cher monsieur de Beausire.

– Et de vous épouser même! s’écria l’exempt tout enthousiasmé.

– Oh! quant à ce dernier point, mon cher monsieur, dit la jeune fille, nous le discuterons plus tard: pour le moment fuir est le principal. Pouvons-nous fuir dans deux heures?

– Dans dix minutes, si vous voulez.

– Non pas; j’ai quelque chose à faire auparavant, et ce que j’ai à faire demande deux heures.

– Dans deux heures comme dans dix minutes, je suis à vos ordres, tendre amie.

– Bien! prenez cinquante louis – la jeune fille compta cinquante louis et les passa par la grille à M. de Beausire, lequel, sans les compter, lui, les engouffra dans la poche de sa veste -; et, dans une heure et demie, continua t-elle, soyez ici avec un carrosse.

– Mais…, objecta Beausire.

– Oh! si vous ne voulez pas, prenons que rien n’est convenu entre nous et rendez-moi mes cinquante louis.

– Je ne recule pas, chère Nicole; seulement, je crains l’avenir.

– Pour qui?

– Pour vous.

– Pour moi?

– Oui. Les cinquante louis disparus, et ils finiront par disparaître, vous allez vous trouver à plaindre, vous allez regretter Trianon, vous allez…

– Oh! comme vous êtes délicat, cher monsieur de Beausire! Allons, allons, ne craignez rien, je ne suis pas de ces femmes que l’on rend malheureuses, moi; n’ayez donc pas de scrupules: d’ailleurs, après ces cinquante louis, nous verrons.

Et Nicole fit sonner les cinquante autres restés dans la bourse.

Les yeux de Beausire étaient phosphorescents.

– Pour vous, dit-il, je me jetterais dans un four brûlant.

– Oh! là! là! on ne vous demande pas tant, monsieur de Beausire; ainsi, c’est convenu, dans une heure et demie le carrosse, dans deux heures la fuite.

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