Harry s’approcha. Ron lui montra une petite sphère à l’intérieur de laquelle on voyait briller une faible lueur, malgré l’épaisse couche de poussière qui recouvrait le verre. Apparemment, l’objet était resté là de nombreuses années sans que personne n’y touche.
– Mon nom ? murmura Harry, interdit.
Il s’avança d’un pas. Harry était moins grand que Ron et dut tendre le cou pour lire l’étiquette jaunie collée sous la sphère poussiéreuse. D’une écriture longue et fine était indiquée une date qui remontait à seize ans auparavant et au-dessous :
Harry contempla l’étiquette.
– Qu’est-ce que c’est ? demanda Ron, visiblement mal à l’aise. Qu’est-ce que ton nom fait là-dessus ?
Harry jeta un coup d’œil aux étiquettes voisines.
– Je ne figure pas sur les autres, dit-il, perplexe. Ni aucun d’entre nous.
– Harry, je crois qu’il ne faut pas y toucher, dit aussitôt Hermione en le voyant tendre la main vers la sphère.
– Et pourquoi pas ? répliqua-t-il. C’est quelque chose qui me concerne, non ?
– Ne fais pas ça, Harry, dit soudain Neville.
Harry se tourna vers lui. Le visage lunaire de Neville luisait de sueur. Il semblait ne plus pouvoir supporter ce surcroît d’angoisse.
– Il y a mon nom dessus, répondit Harry.
Conscient de son imprudence, il referma les doigts sur la sphère poussiéreuse. Il s’était attendu à une sensation de froid mais la boule était tiède au contraire, comme si elle était restée des heures au soleil, comme si la lueur qui brillait à l’intérieur la réchauffait. Prévoyant, espérant même, que quelque chose de spectaculaire se produirait, quelque chose qui justifierait leur long et périlleux voyage, Harry ôta la sphère de son étagère et la regarda de près.
Il ne se passa rien du tout. Les autres firent cercle autour de lui, les yeux fixés sur le globe de verre qu’il frotta pour le débarrasser de sa poussière.
À cet instant, une voix traînante s’éleva derrière eux :
– Très bien, Potter, dit la voix. Maintenant retourne-toi lentement, gentiment, et donne-moi ça.
35. AU-DELÀ DU VOILE
Des silhouettes noires surgirent de partout, bloquant le passage des deux côtés. Des yeux brillaient à travers les fentes des cagoules et une douzaine de baguettes magiques allumées étaient pointées sur leurs poitrines. Ginny étouffa une exclamation d’horreur.
– Donne-moi ça, Potter, répéta la voix traînante de Lucius Malefoy qui tendait la main vers lui.
Harry sentit une nausée l’envahir. Ils étaient cernés par des adversaires deux fois supérieurs en nombre.
– Donne, insista Malefoy.
– Où est Sirius ? demanda Harry.
Les Mangemorts éclatèrent de rire. Une voix féminine, dure et sèche, s’éleva à la gauche de Harry et lança d’un ton triomphant :
– Le Seigneur des Ténèbres sait toujours comment faire !
– Toujours, dit doucement Malefoy, comme en écho. Maintenant, donne-moi la prophétie, Potter.
– Je veux savoir où est Sirius !
–
Les Mangemorts s’étaient rapprochés et n’étaient plus qu’à quelques dizaines de centimètres de Harry et des autres. Les rayons de lumière qui jaillissaient de leurs baguettes magiques l’éblouissaient.
– Vous l’avez fait prisonnier, dit Harry.
Il décida de ne pas prêter attention à la panique qu’il sentait monter dans sa poitrine, à cette peur qu’il combattait depuis le moment où ils s’étaient glissés dans l’allée quatre-vingt-dix-sept.
– Il est ici, je le sais.
– Le petit bébé f’est réveillé en furfaut et a cru que fon rêve était vrai, dit la femme en imitant une horrible voix d’enfant.
Harry sentit Ron bouger à côté de lui.
– Ne tente rien, marmonna Harry. Pas encore…
La femme éclata d’un rire rauque.
– Vous l’entendez ?
– Oh, tu ne connais pas Potter comme je le connais, Bellatrix, dit doucement Malefoy. Il a une faiblesse très marquée pour le mélodrame. Le Seigneur des Ténèbres a très bien compris cela chez lui.
– Je sais que Sirius est ici, répondit Harry.
Une peur panique lui serrait la poitrine. Il avait l’impression de ne plus pouvoir respirer normalement.
– Je sais que vous l’avez fait prisonnier !
De nouveau, les Mangemorts éclatèrent de rire et c’était la femme qui riait le plus fort.
– Il serait temps que tu apprennes à faire la différence entre la vie et les rêves, Potter, dit Malefoy. Donne-moi cette prophétie ou nous devrons nous servir de nos baguettes.
– Très bien, allez-y, répliqua Harry en brandissant la sienne.
Aussitôt, les cinq baguettes magiques de Ron, d’Hermione, de Neville, de Ginny et de Luna s’élevèrent en même temps autour de lui. Le nœud qui contractait l’estomac de Harry se resserra. Si vraiment Sirius n’était pas ici, il aurait mené ses amis à la mort sans aucune raison…