Читаем Catherine Il suffit d'un Amour Tome 2 полностью

Elle escomptait, ce soir-là, sa mission remplie, passer la soirée avec ses amis qui, certainement, la garderaient à souper comme ils ne manquaient jamais de le faire. Et Catherine se laissait bercer au pas de son cheval dans les derniers poudroiements d'or du soleil. Il ferait bon, ce soir, souper à l'ombre du gros tilleul dans le jardin des Cœur où les roses et le chèvrefeuille embaumaient jusque dans la rue. L'évocation de ce parfum amena à ses lèvres une chanson mélancolique, un vieux lai de Marie de France :

Il en était de leurs deux cœurs tout ainsi que du chèvrefeuille Qui au coudrier se prenait...

Où battait, à cette heure, le cœur d'Arnaud ? Les murs de Compiègne le protégeaient-ils toujours ou bien Jehanne avait-elle réussi à dégager la ville et à rouvrir devant ses soldats la route de Picardie ? Là où était la Pucelle, rien de mauvais ne pouvait advenir à l'un de ses hommes. Elle portait avec elle la chance, la protection divine. Il suffisait de plonger au plein de l'eau tranquille de ses prunelles pour se sentir baigné de confiance et de force...

Perdue dans ses pensées, Catherine ne prêtait pas ; attention au mouvement de la rue. Elle n'entendit pas se rapprocher le galop d'un cheval et ne descendit de ses songes que lorsque le cheval en question l'eut rattrapée, dépassée et, voltant sur ses pattes postérieures, lui eut barré le chemin. Un homme en armure souillée de sang séché, si couvert de poussière que visage et acier avaient la même grisaille, le montait. Seuls les cheveux presque rouges avaient encore un peu de couleur et Catherine reconnut Xaintrailles. Elle eut une exclamation de surprise, sourit et tendait déjà les mains vers le capitaine mais lui, sans prendre la peine de saluer, jeta :

— Je viens du palais où l'on m'a dit que vous étiez en route pour la maison de Jacques Cœur. Je vous cherchais, dame Catherine.

Son large visage, si gai habituellement, était tiré, verdâtre sous les plaques de poussière mêlée de sueur qui le maculaient. Instinctivement, Catherine pressentit un malheur.

— Que se passe-t-il, messire ? Quel message que je devine terrible m'apportez-vous ? Dites vite... Arnaud ?

— Il est blessé... gravement et vous réclame ! Et puis... Jehanne est prisonnière du Bourguignon ! Je dois vous ramener...

Voyant que Catherine s'était arrêtée, les valets qui menaient les chariots en avaient fait autant. Mais la jeune femme, pétrifiée, les avait oubliés. On aurait dit que la foudre venait de la frapper. Elle restait là, immobile, très droite et le regard vide, sur son cheval qui grattait le sol d'un sabot impatient.

L'un des serviteurs s'approcha timidement, tira le bas de sa robe.

— Dame... Que faisons-nous ?

Elle regarda l'homme comme si elle le voyait pour la première fois, avec une espèce de surprise. Un frisson la traversa des pieds à la tête et elle parut reprendre conscience. Sa main eut un geste incertain.

— Allez sans moi ! Dites... à maître Cœur que je ne puis venir... qu'il fasse le nécessaire et saluez-le pour moi. Il me faut rentrer à l'instant...

Puis, comme le valet s'inclinait et s'éloignait, elle tourna vers Xaintrailles, muet, son visage douloureux.

— Dites-moi la vérité ! Il est mort, n'est-ce pas ?

— Non... puisqu'il vous demande. Mais si vous ne vous hâtez pas, il se peut que vous ne le retrouviez pas vivant...

Sous la douleur, Catherine ferma les yeux. Un flot de larmes s'en échappa, roulant sur ses joues tandis qu'un sanglot déchirait sa gorge. Ainsi, le destin avait frappé. Arnaud était mourant ! Comment pareille chose pouvait-elle être possible ? Est-ce qu'il n'y avait pas là quelque chose d'absurde et d'inimaginable ? Arnaud était aussi indestructible que la terre elle-même !...

Et d'ailleurs, Jehanne n'était-elle pas là ? Mais... Xaintrailles avait dit quelque chose au sujet de Jehanne ? Ah oui !... Qu'elle était prisonnière.

Prisonnière, la Pucelle ? Une autre absurdité ! Qui pouvait emprisonner l'envoyée du Seigneur ?

— Catherine ! s'impatienta Xaintrailles d'une voix rude. Il faut rentrer, vous préparer. Le temps presse !

Elle hocha la tête. Bien sûr, il fallait faire vite ! très vite ! Il n'y avait plus une minute à perdre. Elle tourna la tête de son cheval en direction du palais dont les toits d'ardoise s'incendiaient sous les derniers rayons rouges du soleil. Le ciel, tout là-haut, devenait sombre.

— Je vous suis, dit-elle simplement.

Перейти на страницу:

Похожие книги