Читаем Le Serment des limbes полностью

Je ruisselais de sueur. Les fumées d’encens me piquaient les yeux. Tout paraissait rouge, comme si mes yeux injectés teintaient ma propre vision. À travers cet écran, le Visiteur des Limbes se matérialisait. Je l’imaginais, sans visage, achetant l’iboga noir pour concocter ses cocktails chimiques, les injections qu’il pratiquait sur les futurs Sans-Lumière.

Je me relevai. Foxy pilonnait toujours, lentement, les yeux baissés sur sa vasque : tac-tac-tac… Elle murmura :

— Il garde un œil sur nous. Il nous traque.

— Qui ?

— Celui qui a tué ma fille. Celui qui a tué Larfaoui.

Ma gorge brûlait, comme si j’avais fumé un joint d’encens. Je rétorquai :

— C’est moi qui le traque.

La sorcière ricana. Je montai le ton — ma voix n’était plus qu’un grincement :

— Ne me sous-estime pas. Personne n’a encore gagné la partie !

— Tu sais pas qui tu as en face. (Elle prit une expression de pitié moqueuse.) Honey, t’as rien compris à cette histoire !

<p>105</p>

4 heures du matin.

Coup de fil. La voix de Foucault :

— J’ai logé ta comique. Rue des Trois-Fontanots, à Nanterre. L’adresse d’une importante annexe du ministère de l’Intérieur, abritant plusieurs Offices centraux.

— Tu y vas, là ?

— J’en viens. C’est plié.

— Tu as ce que je t’ai demandé ?

— Tout le dossier scanné, mon petit père. La partie qui concerne Manon.

— Où tu es ?

— J’arrive chez moi. J’aimerais dormir quelques heures, si ça ne te dérange pas.

Foucault habitait le quinzième arrondissement, derrière le quartier de Beaugrenelle.

— Je suis à République, dis-je en tournant la clé de contact. En bas de chez toi dans dix minutes ?

— Je t’attends.

Je filai sur les quais de la rive gauche. La pluie avait cessé. Une atmosphère d’aube, lointaine encore, planait sur le Paris miroitant. Personne dans les rues ni dans le monde conscient. J’aimais cette sensation. Celle du cambrioleur, seul et libre. Du casseur qui vit à rebours des autres hommes, sur l’axe de l’espace et celui du temps.

Je dépassai Beaugrenelle et tournai à gauche, avenue Emile-Zola, jusqu’à croiser la rue du Théâtre. Je repérai la Daewoo de Foucault, phares éteints. Dès qu’il m’aperçut, il jaillit dehors et me rejoignit dans ma voiture.

À peine assis, il me lança une clé USB.

— Il y a tout. J’ai shooté les PV d’audition et je les ai compressés.

— C’est compatible avec Macintosh ?

— Aucun problème. Je t’ai joint un plug-in de transcription.

Je regardai le rectangle argenté, au creux de ma paume :

— Pour accéder au bureau de Magnan, comment t’as fait ?

— J’ai montré ma carte. Aller au plus simple, toujours : c’est toi qui m’as appris ça. Le planton dormait à moitié. Je lui ai dit qu’on était en pleine garde à vue et qu’on avait besoin d’un dossier. Je lui ai même montré le trousseau de chez moi en lui affirmant que le juge m’avait filé les clés de son bureau.

J’aurais dû le féliciter, mais ce n’était pas prévu dans nos accords. Il enchaîna :

— J’ai jeté un œil aux auditions. Ils n’ont rien contre elle.

— Merci.

Foucault ouvrit la portière. Je l’arrêtai :

— Je veux vous voir demain matin, toi, Meyer, Malaspey. 9 heures.

— À la boîte ?

— À l’Apsara.

— Conseil de guerre ? demanda-t-il en souriant.

Je lui répondis d’un clin d’œil :

— Dis-le aux autres.

Il acquiesça et referma la portière. Je traversai la Seine et empruntai la voie express en sens inverse. Dix minutes plus tard, j’étais rue de Turenne. Epuisé, hagard — mais impatient de lire les éléments de Magnan.

Je me rangeai sur les clous, au coin de ma rue. Je composais le code de mon porche quand j’aperçus la voiture de mes BAC. Un sixième sens m’avertit qu’ils roupillaient — la masse de la bagnole, les vitres embuées. Une espèce d’inertie indéfinissable. Je frappai au carreau. L’homme fit un bond à l’intérieur, se cognant au plafonnier.

— C’est comme ça que vous surveillez l’immeuble ?

— Désolé, je…

Je n’attendis pas ses explications. Je montai mon escalier quatre à quatre, pris soudain d’une angoisse. Je déverrouillai la porte, traversai le salon. Je passai dans la chambre, retenant mon souffle : Manon était là, endormie.

Je m’adossai au chambranle et me détendis. Je contemplai sa silhouette, suggérée par la couette. De nouveau, cet état étrange, confus, qui ne me quittait pas depuis la Pologne. Mi-excitation, mi-engourdissement. Une fébrilité au bout des membres, qui m’électrisait et m’anesthésiait à la fois.

Je revins vers le vestibule, ôtai mon imper et posai mon arme. La pluie furieuse frappait le toit, les vitres, les murs — tout l’espace était plongé dans une immersion crépitante, cadencée.

Je m’installai derrière mon bureau et glissai la clé USB dans mon Mac. L’icône du dossier apparut. J’intégrai le programme donné par Foucault puis ouvris les pages de la magistrate.

Foucault avait dit vrai : Corine Magnan n’avait rien.

Ni contre Manon, ni contre qui que ce soit.

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