Читаем La Chartreuse De Parme полностью

Fabrice entra avec précaution, et se trouva à la vérité dans l’orangerie, mais vis-à-vis une fenêtre fortement grillée et élevée, au-dessus du sol, de trois ou quatre pieds. L’obscurité était profonde, Fabrice avait entendu quelque bruit dans cette fenêtre, et il en reconnaissait la grille avec la main, lorsqu’il sentit une main, passée à travers les barreaux, prendre la sienne et la porter à des lèvres qui lui donnèrent un baiser.

– C’est moi, lui dit une voix chérie, qui suis venue ici pour te dire que je t’aime, et pour te demander si tu veux m’obéir.

On peut juger de la réponse, de la joie, de l’étonnement de Fabrice; après les premiers transports, Clélia lui dit:

– J’ai fait vœu à la Madone, comme tu sais, de ne jamais te voir; c’est pourquoi je te reçois dans cette obscurité profonde. Je veux bien que tu saches que, si jamais tu me forçais à te regarder en plein jour, tout serait fini entre nous. Mais d’abord, je ne veux pas que tu prêches devant Anetta Marini, et ne va pas croire que c’est moi qui ai eu la sottise de faire porter un fauteuil dans la maison de Dieu.

– Mon cher ange, je ne prêcherai plus devant qui que ce soit; je n’ai prêché que dans l’espoir qu’un jour je te verrais.

– Ne parle pas ainsi, songe qu’il ne m’est pas permis, à moi, de te voir.

Ici, nous demandons la permission de passer, sans en dire un seul mot, sur un espace de trois années.

A l’époque où reprend notre récit, il y avait déjà longtemps que le comte Mosca était de retour à Parme, comme premier ministre, plus puissant que jamais.

Après ces trois années de bonheur divin, l’âme de Fabrice eut un caprice de tendresse qui vint tout changer. La marquise avait un charmant petit garçon de deux ans, Sandrino, qui faisait la joie de sa mère; il était toujours avec elle ou sur les genoux du marquis Crescenzi; Fabrice au contraire, ne le voyait presque jamais; il ne voulut pas qu’il s’accoutumât à chérir un autre père. Il conçut le dessein d’enlever l’enfant avant que ses souvenirs fussent bien distincts.

Dans les longues heures de chaque journée où la marquise ne pouvait voir son ami, la présence de Sandrino la consolait; car nous avons à avouer une chose qui semblera bizarre au nord des Alpes: malgré ses erreurs elle était restée fidèle à son vœu; elle avait promis à la Madone, l’on se le rappelle peut-être, de ne jamais voir Fabrice; telles avaient été ses paroles précises: en conséquence elle ne le recevait que de nuit, et jamais il n’y avait de lumières dans l’appartement.

Mais tous les soirs il était reçu par son amie; et, ce qui est admirable, au milieu d’une cour dévorée par la curiosité et par l’ennui, les précautions de Fabrice avaient été si habilement calculées, que jamais cette amicizia, comme on dit en Lombardie, ne fut même soupçonnée. Cet amour était trop vif pour qu’il n’y eût pas des brouilles; Clélia était fort sujette à la jalousie, mais presque toujours les querelles venaient d’une autre cause. Fabrice avait abusé de quelque cérémonie publique pour se trouver dans le même lieu que la marquise et la regarder, elle saisissait alors un prétexte pour sortir bien vite, et pour longtemps exilait son ami.

On était étonné à la cour de Parme de ne connaître aucune intrigue à une femme aussi remarquable par sa beauté et l’élévation de son esprit; elle fit naître des passions qui inspirèrent bien des folies, et souvent Fabrice aussi fut jaloux.

Le bon archevêque Landriani était mort depuis longtemps; la piété, les mœurs exemplaires, l’éloquence de Fabrice l’avaient fait oublier; son frère aîné était mort et tous les biens de la famille lui étaient arrivés. A partir de cette époque il distribua chaque année aux vicaires et aux curés de son diocèse les cent et quelque mille francs que rapportait l’archevêché de Parme.

Il eût été difficile de rêver une vie plus honorée, plus honorable et plus utile que celle que Fabrice s’était faite, lorsque tout fut troublé par ce malheureux caprice de tendresse.

– D’après ce vœu que je respecte et qui fait pourtant le malheur de ma vie puisque tu ne veux pas me voir de jour, dit-il un jour à Clélia, je suis obligé de vivre constamment seul, n’ayant d’autre distraction que le travail; et encore le travail me manque. Au milieu de cette façon sévère et triste de passer les longues heures de chaque journée, une idée s’est présentée, qui fait mon tourment et que je combats en vain depuis six mois: mon fils ne m’aimera point, il ne m’entend jamais nommer. Elevé au milieu du luxe aimable du palais Crescenzi, à peine s’il me connaît. Le petit nombre de fois que je le vois, je songe à sa mère, dont il me rappelle la beauté céleste et que je ne puis regarder, et il doit me trouver une figure sérieuse, ce qui, pour les enfants, veut dire triste.

– Eh bien! dit la marquise, où tend tout ce discours qui m’effraye?

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